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[EVENT : bal de la Licorne] Rancune tenace ▬ Gerhard | FINI :: Archives :: Bibliothèque des anciens RP :: Présent :: Event 2024 — Le Bal de la Licorne
Vynce Stanford
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Vynce Stanford
EVENT ▬ Rancune tenace
Et les dents si longues qu’elles râclent le sol
Le déroulement de la soirée s’est passé agréablement bien. Pourtant, quelque chose en toi ne t’a pas permis de t’amuser réellement. Cette pointe dans ta poitrine qui n’a cessé d’être douloureuse. Tu sais à quoi c’est dû et tu pensais que ça se dissiperait au cours de cette soirée. Danser avec Opale était agréable, Eowin aussi, tu as même dansé avec d’autres convives. Et pourtant, toujours cette pique d’angoisse. Tu as été assez étonné de ne pas voir Ezekiel au centre communautaire d’ailleurs. Ta méfiance à son égard s’est accrue depuis l’épisode du lièvre et tu as dû même aller faire ton rapport auprès de la Matriarche. Ton point de vue n’étant pas celui du professeur, il n’est pas impossible qu’elle le convoque pour en savoir plus sur le sort de ce braconnier, retrouvé mort non loin de l’endroit où vous avez trouvé le lièvre. Tu peux bien admettre qu’il puisse s’agir de légitime défense puisqu’Ezekiel était blessé quand tu es arrivé à sa rencontre, mais cette tragédie n’a pas aidé non plus. Enervé comme tu étais, tu as plusieurs fois tourné tes pulsions quant à savoir si tu allais passer une soufflante auprès du nébuleux ou non, car si ça avait été le cas, il est certain qu’il t’aurait probablement rit au nez en plus de te sortir des monologues sur le karma et la tragique dureté de la vie.

Oui, tu n’étais pas tranquille ce soir, beaucoup trop de pensées parasites ne t’ont pas aidé à te détendre. Tu revois encore la silhouette de Gerhard, patibulaire, s’éloigner dans les ténèbres de la ville. Tu t’es dit que tu avais besoin de souffler un peu, loin du bruit, loin de l’agitation. Tu as marché distraitement sans trop savoir où tu allais. Juste, il te fallait souffler un peu. Juste un petit peu. Tu as demandé à l’un de tes collègues de prendre la relève au centre communautaire et malgré le fait de rester attentif sur la flore environnante de l’île, tu t’es éloigné jusqu’au petit port pour observer les vagues et l’étendue d’eau jusqu’au mur de brouillard qui se perçoit même dans les ténèbres. Tu ne t’approches habituellement pas de ces endroits remplis d’eau de mer, d’une, de peur d’y tomber et ne pas pouvoir te rattraper ou remonter à la surface, de deux parce-que tu n’aimes pas l’odeur du poisson ou iodé qu’apporte la mer. Pourtant, tes pas t’ont guidé jusqu’ici, alors tu tournes la tête vers le petit bar qui surplombe la plage et t’y rends. Tu commandes une bière en saluant le vendeur. Comme c’est la fête un peu partout en ville, il y a des endroits encore plus peuplés que d’autres à cette heure tardive. La plage est pratiquement déserte, mais il reste quelques petits groupes qui animent encore un peu cette dernière. Certains retardataires sont en train de lâcher leurs lanternes alors que les airs ont déjà emporté leurs comparses au loin.

Distraitement, tu te cales contre un mur qui surélève la rue et donne accès à la plage. Une épaule appuyée contre celui-ci, tu observes les jeunes, t’assurant qu’il ne vienne, d’aucun, l’envie d’aller se jeter à l’eau en étant alcoolisé. Surveillant silencieux, ton verre se porte à tes lippes et tu dégustes ta première gorgée d'alcool. C’est ton seul et unique verre alors tu prends le temps de le boire. Tu n’as pas l’intention de te saouler ce soir, tu restes relativement sérieux pour assurer ton travail qui plus est.

Seulement, une silhouette attire ton attention. A sa démarche, tu reconnais ce dernier. Tu ne l’as pas croisé souvent ni étudié assez longtemps, mais ça te saute assez vite aux yeux. Il t’a suffisamment perturbé ce soir pour ne pas oublier cette allure nonchalante et surtout, l’aura qui s’en dégage. Pourtant, tu ne bouges, pas, préférant rester indifférent dans la fixation de cette tâche sombre qui se rapproche pour retourner sur le pavé et l’asphalte de la ville. S’éclaircissant à mesure qu’elle se rapproche des lumières. Tu perçois enfin le visage de Gerhard. Toujours aussi patibulaire. Pourtant, tu le fixes sans rien dire, avec pour seul geste celui de porter ton verre à tes lippes pour boire quelques gorgées houblonnées. Par pur réflexe, ton corps se tend à son approche, tu n’es pas à l’aise en sa présence, elle te rappelle trop la colère d’Opale, de celles qu’il ne t’a jusqu’alors jamais montré, mais tu ressens aussi, émanant de cet éphémère, une rancune tenace qu’il se traine lourdement. Comme dit plus tôt en début de soirée, tu ne forceras pas la conversation s’il ne souhaite pas t’adresser la parole. Mais tu n’es pas non plus fermé à la discussion, juste, sur la défensive.
Ft. Gerhard Speckmann “”


Dim 21 Avr 2024 - 23:43
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Gerhard Speckmann
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Gerhard Speckmann
Les températures étaient assez agréables en cette soirée d'avril. Il s'était attendu à frissonner à un moment ou un autre, vaincu par les airs frais qui ventaient encore dans cette période de l'année. Le temps, cependant, avait décidé d'être clément, et le ciel nocturne était dégagé, pas un nuage à l'horizon, pas même un souffle pour déloger la quiétude du bal. Pure chance ou intervention magique ? Tout était possible à Nitescence.

Gerhard avait quitté le plus gros des festivités pour le moment, évitant le centre communautaire en cette période d'affluence. A cette heure-ci, quasiment tout Lucent avait dû y converger, à la recherche d'une boisson ou de compagnons de soirée. Il avait fermé son bureau, qui se trouvait à l'étage du centre, hier, et le travail ne lui manquait pas assez pour qu'il y trouve refuge. Si ses premiers jours avaient été passés dans les confins de sa chambre, Gerhard n'était plus un adolescent, et de toute façon n'avait jamais tenu à rester enfermé plus que nécessaire. L'ambiance festive avait eu raison de ses dernières réserves, et si Gerhard évitait la foule en cet instant, fréquenter des audiences plus calmes lui seyait davantage.


Le petit port lui rappelait son arrivée à Nitescence. Il s'était installé sur la plage, grâciant le sable de son auguste fessier, un verre d'un jus indéterminé à la main. Son regard, cependant, n'était pas fixé sur l'horizon, mais plutôt sur ce petit ponton qu'il avait foulé bien des semaines plus tôt, alors à moitié malade par les relents de la mer, et craintif de ce monde nouveau qui l'attendait. Rien ne lui avait été familier ; aujourd'hui, ses yeux contemplaient patiemment un paysage qui lui était devenu habituel. Il longeait parfois le port en rentrant du travail, heureux de laisser le bruit des vagues chasser les pensées moroses qui polluaient son esprit. Y faire le vide était nécessaire pour ne pas ployer sous la pression. Gerhard travaillait avec plaisir, mais la panique qui l'étreignait parfois en se rendant compte que nombres de gens, ici, avaient grand espoir en lui, rendait cette balade nécessaire.

Il reprit une gorgée de son jus, reconnut finalement la saveur - pomme, basique mais toujours efficace - et autorisa son regard à couler au-delà des planches en bois et des bateaux qui mouillaient au port ; à se fixer sur l'horizon, vers lequel on se tournait naturellement.

Tout cela lui manquait, parfois. Pas son pays, pas nécessairement, si ce n'est pour le réconfort qu'amenait la familiarité. Mais les possibilités qu'il n'avait plus : un monde entier à explorer qu'il ne pourrait plus qu'observer au travers de cartes postales aux rebords abimés, de récits des temps anciens, de livres tout aussi vieux. C'était un regret minime, à peine un pincement qui allait et venait, mais ce soir-là alors que l'on fêtait la paix et pleurait les morts autour de lui, il ne pouvait s'empêcher d'y penser.


Gerhard ramena ses pieds sous lui et se releva lentement. Verre à la main, il jeta un dernier regard à l'horizon avant de s'en détourner. Il finit son jus. Rien ne servait de traîner et de penser à ce qui aurait pu être. Il était là, c'était indéniable, c'était le principal. Il fallait qu'il se focalise sur ce qu'il avait.

Songeur, il tourna la tête vers le gros de la fête, imperceptible à cet endroit mais dont les clameurs parvenaient jusqu'au port. La fête battait son plein au centre communautaire et il se sentait d'aplomb pour l'affronter. Il y avait laissé Opale et Gabriel, sachant pertinemment qu'ils étaient entre de bonnes mains, mais ne pouvant s'empêcher d'en redouter une paire. Cet isolement, cependant, ne serait pas bien perçu sur le long terme, et qu'à cela ne tienne : Gerhard irait au-delà de ses appréhensions, si ce n'est pour faire plaisir à son docteur de colocataire.

Une rafale de vent souffla soudainement, attirant son attention vers le ciel : certains, parmi les petits groupes qui parsemaient la plage quasiment déserte - du moins, par rapport à Lucent - avaient lâché des lanternes, qui s'élevaient parmi les airs comme tant d'étoiles filantes. Un temps captivé, il se sentit bête en constatant qu'il n'avait que son verre à lancer. Qui sait où se trouvaient les lanternes à jeter ; sûrement au centre communautaire, s'y rendre apparaissait de plus en plus urgent. C'était une belle tradition à laquelle il voulait y ajouter sa pierre, aussi minuscule soit-elle.


Ses pieds s'enfoncèrent dans le sable alors qu'il y prenait des pas décidés. Il lui tardait de rejoindre les pavés de Lucent, toujours plus agréable à fouler quand on était en habit formel. Il ne tenait pas à abimer les chaussures qu'Opale lui avait gentiment prêté pour l'occasion. Le cabanon où il s'était fourni en boisson bruissait d'activité tranquille, l'ambiance était calme et relaxée.

Et, appuyé contre le bois des murs, se tenait Vynce.

Leurs regards se croisèrent et Gerhard en fut un temps paralysé. Ses poignets fourmillaient d'une sensation fantôme ; il s'agita les mains pour en chasser la sensation, et projeta sur sa chemise des gouttelettes de jus de pomme qui étaient restés dans le fond. Gerhard grimaça, puis métamorphosa ses traits en un masque de neutralité en se rendant compte que Vynce l'observait. Il tâcha de ne pas lever le menton trop haut, se rappelant l'opinion qu'avait Opale sur un tel geste, et hésita un moment à emporter son verre avec lui au centre-ville.

Mais non, c'était ridicule. Il avait résolu à affronter ces... menus désagréments ce soir, et si un se présentait aussi vite devant lui, c'était simplement qu'il en était ainsi. Gerhard n'allait pas se transformer en voleur de verre - aussi ridicule que soit ce crime - parce que croiser le regard de Vynce le tendait. Tout cela, tentait-il de raisonner, c'était du passé. Il s'était rabiboché avec Opale, il... supposait qu'il pouvait tendre un semblant de branche d'olivier à Vynce, si ce n'est sous la forme d'un hochement de tête poli, ou d'une conversation anodine dont il masquerait l'animosité qu'elle lui inspirerait sûrement.


Parvenu au cabanon, Gerhard échangea à voix basse avec le gérant, qui reprit sa vaisselle avec un hochement de tête reconnaissant. Il l'observa s'atteler à sa plonge pendant quelques secondes, se perdant dans la contemplation de son dos, avant de prendre une profonde inspiration et de se tourner résolument vers le gardien.

La dernière fois qu'il l'avait contemplé d'aussi près, Gerhard était ligoté à une table. Rien ne subsistait de cette désastreuse première impression : d'un tas qui se confondait en excuse, Vynce le contemplait désormais avec un calme olympien. Il avait abandonné ses habits plus relaxés pour un costume anthracite qui cintrait ses formes. Un éclat de rouge pointait entre deux couches de bleu. Gerhard réajusta la fleur qui adornait son noeud papillon et le salua, comme lorsqu'ils s'étaient croisés tout à l'heure, d'un signe de tête sec.


- Monsieur... il creusa son cerveau jusqu'à déterrer le souvenir qui convenait. Stanford. Bonne soirée ? Il grimaça intérieurement. La réponse, à dire vrai, ne l'intéressait pas vraiment, et avait le potentiel de s'étirer, lancinante, et de le retenir bien trop longtemps à son goût ; aussi se corrigea-t-il dans le même souffle : Pas de problème ce soir ?


Voilà. Quelque chose qui permettrait un peu à Vynce de se languir sur sa condition de gardien, et à Gerhard d'hocher la tête morosement en attendant la fin.
Lun 22 Avr 2024 - 17:29
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Vynce Stanford
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Vynce Stanford
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Et les dents si longues qu’elles râclent le sol
A mesure que Gerhard s’approche, tu remarques qu’il a, lui aussi, capté ton regard. L’espace d’un instant, tu as l’impression qu’il brûle douloureusement sous tes prunelles céruléennes. Tu perçois sa grimace brève, son mouvement de la main. Le bref arrêt dans sa marche alors qu’il te reconnaît, là, contre la paroi, dirigé vers la plage en buvant tranquillement ton verre de bière. Le malaise étant présent, tant chez lui que chez toi, mais contrairement à lui, tu n’en montres absolument rien, caché derrière ce verre que tu portes à tes lippes pour y récupérer le liquide ambré.

C’est quand il s’avance vers la roulotte et rend son verre au vendeur en lui adressant quelques mots que tu remarques ton regard sur le psychologue, probablement un peu trop insistant. Alors tu détournes les pupilles en silence. Te concentrant quelques instants sur les jeunes du côté de la plage. Un plissement de paupières bref alors que tu perçois trois jeunes en train de chahuter sur le bord de mer, l’un court avec sa lanterne jusqu’à l’eau et tu te redresses un peu, mais bien vite, il recule lorsque les vagues touchent ses pieds, lâchant sa lanterne pour qu’elle s’envole dans le ciel. Les deux autres le rattrapent et ils se mettent à courir plus loin sur la plage. Non seulement voir des gens proches de cette vaste étendue saline ne te met pas à l’aise, mais en plus, la présence de Gerhard te raidi au possible, tu as l’impression que toute ton écorce est en train de former des nœuds. Et ce n'est pas du tout agréable.

Le pseudo-pseudo danger passé, tu te détends un peu et te rappuies contre la bicoque en ramenant ton bras gauche sous le droit qui tient le verre. Ta jambe droite en appui permet à la gauche de passer devant celle-ci pour se croiser, la pointe de ton pied s’agitant distraitement contre le pavé sablonneux au rythme d’une musique que tu perçois sans mal au loin, celle qui anime la soirée au centre communautaire.

C’est en percevant Gerhard se tourner vers toi que ton visage coule dans sa direction, calme, impassible, serein, aucune animosité ne ressort de tes orbes azur qui captent les perles sombres de ton homologue. Dans un silence religieux, tu te contentes d’entendre ses premiers mots destinés à t’interpeller. Ton cœur s’emballe dans ta poitrine à l’énoncée de ce dernier. Ton nom, celui de ton père adoptif, lancée à voix haute pour appliquer une distance perceptible entre lui et toi. Tu fermes les yeux à sa question. Tu as passé une bonne soirée, oui, mais elle aurait pu être mieux, beaucoup mieux sans ces pensées parasites. Mais tu te réserves bien de le lui dire. Ton esprit se contente de divaguer un instant, relié entre toute la flore de l’île, principalement concentré sur les convives, mais pas seulement, ceux qui sont absents ou à l’écarts comme ceux de la plage. Tu ne crains pas tant un conflit en plein centre communautaire devant des centaines de témoins, non, tu crains plutôt les lieux sombres et isolés où il est facile de se faufiler et d’attenter à la vie d’un innocent, ou des querelles exercées à l’abri des regards et à l’écart de tous pouvant dégénérer. Des tas d’opportunités en réalité, tandis que la vie bat son plein et danse sans se soucier du reste au cœur de Lucent. Cette image te rappelle que trop bien la situation de l’île vis-à-vis des conflits extérieurs. Vous n’êtes pas tant à l’abri que ça ici, tout le monde se connaît, mais le moindre problème peut prendre de grosses ampleurs parce que les ragots vont vite et on n'est pas à l'abri d'une paranoïa destructrice.

La rectification de Gerhard ne t’est pas indifférente. Tu rouvres les yeux et plonges ton regard dans sa direction avec un sourire timide, beaucoup trop poli pour ne pas être honnête et amical avec ton prochain. S'en dégage de ce sourire une retenue et une méfiance absolues. Quand bien même, tu veux paraître détendu, c'est loin d'être le cas.
“Pas encore, Monsieur Speckmann…” Oui, tu ne t’es pas fait prier pour aller faire quelques petites recherches sur le psychologue, exactement comme tu le fais avec tous les nouveaux arrivants de l’île. En plus d’être peut-être un peu trop curieux quand tu t’y mets, tu as tendance à observer via les plantes comme tu le fais actuellement. Mais que dire quand, l’un comme l’autre, êtes tendus et sur la défensive ? Tu as l’impression que le moindre petit mot pourrait devenir une bombe nucléaire ou le premier coup de cloche qui vous pousserait à vous savater tels deux boxeurs dans un ring. Tu n’aimes pas cette sensation. Ça te met beaucoup trop dans le mal-être et tu te vois être peu loquace dans ce genre de moments. “Et vous ? Ça va comme vous voulez ? Vous profitez un peu quand même ?” Mais tu as presque l’impression qu’il a passé la soirée sur cette plage sans rien faire d’autre qu’attendre ou observer les ténèbres de la mer. “Vous m’en voulez encore pour cette histoire, pas vrai ?”
Tu n'as même pas réfléchi à ta question qu’elle est sortie sans détour. Beaucoup trop franc dans la demande mais pas non plus agressif, juste, une interrogation que tu n’as cessé d’avoir au cours de cette soirée. Te disant qu'il serait dommage de rater une telle occasion pour la poser. Raison pour laquelle tu justifies ta demande. “C’est dommage de ne pas être venu plus tôt au centre communautaire, vous avez raté quelques petites pépites.” Tu te contentes d’un hochement de tête amical avec un bref rictus pour détourner la tête et boire une nouvelle gorgée d’ambre. Tu baisses ensuite ton bras, revenant sur ton interlocuteur. “Mais il n’est pas trop tard pour vous y rendre, l’orchestre bat son plein et les danses continueront toute la nuit.” Et Opale doit être dans un coin à danser avec son verre ou un autre cavalier qu’il aura attrapé au cours de la soirée. Après tout, il est venu à son bras, non ? Quoiqu'il en soit, tu y retournera pour aller récupérer Opale et le ramener chez lui au besoin. Mais qui sait, il n'aura peut-être pas besoin de toi à ce moment là, Gerhard saura le guider jusqu'au manoir. Puisqu'ils sont colocataires.

Ft. Gerhard Speckmann “”


Lun 22 Avr 2024 - 23:10
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Gerhard Speckmann
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Gerhard avait fini par comprendre que Vynce était quelqu'un de souriant. C'était... déstabilisant, d'une certaine manière, il n'avait jamais connu une personne aussi rayonnante, et il se demandait maintenant comment le gardien trouvait l'énergie de maintenir ce rictus en toutes circonstances. Gerhard pouvait lui trouver au moins trois raisons de le perdre, non pas qu'il les aurait partagées : Opale l'aurait foudroyé sur place, à moitié aveugle ou non.

Il aurait été plus facile d'interpréter des lèvres pincées, des sourcils froncés. Les signes clairs que quelqu'un était contrarié. Un sourire pouvait être manipulé, et il avait autant de saveurs que Gerhard en loupait la plupart. Un sourire pouvait être sincère ou son contraire, et ceux de Vynce il n'en accordait aucune confiance.


- Pas encore, Monsieur Speckmann…


Il tiqua à peine à l'entente de son nom. Vynce avait dû faire quelques recherches, car il était certain de ne pas lui avoir donné. La cordialité de l'homme le prenait au dépourvu, quoiqu'elle paraissait assez spontanée pour être sincère. Ils ne se battraient pas en place publique, donc, ce qui était bienheureux : Gerhard avait beau faire la taille d'une petite colline, il n'en avait pas la résistance. Son nom de famille, au moins, évitait à Vynce d'écorcher son prénom, qui depuis son arrivée à Nitescence s'était affublé de multiples nationalités. Gérard, Gerardo, Guérard, Gerry, ce dernier particulièrement horripilant, aucun particulièrement juste. Il était surpris, même, que Vynce n'ait pas pris feu en mâchouillant quelque syllabe d'allemand dans ses mandibules.


- Et vous ? Ça va comme vous voulez ? Vous profitez un peu quand même ? reprit Vynce, le sauvant de l'embarras de trouver un sujet de conversation, ou un moyen de décamper de là le plus vite possible. Etait-ce un sauvetage, cependant, quand cela le contraignait à davantage de parlote dont ni l'un, ni l'autre, n'avait grand chose à faire ?

Il serra le poing que Vynce ne pouvait voir, résumant la tension qu'il s'efforçait de cacher dans cette main unique. Sentir sa peau rouler sur ses phallanges le conforta quelque peu.


- Vous m’en voulez encore pour cette histoire, pas vrai ? Et comme un tel éclat de génie ne pouvait vivre seul, Vynce le couvrit tout aussi vite : C’est dommage de ne pas être venu plus tôt au centre communautaire, vous avez raté quelques petites pépites.


Et enfin, Vynce se détourna, s'interrompant assez longtemps pour reprendre une gorgée de ce qui devait être une bière. Gerhard ne voulait pas se prononcer sur la décision de boire sur son lieu de travail : après tout, toute l'île était le terrain de jeu du Nébuleux, et il ne devait pas avoir beaucoup d'occasion de se détendre. Qu'importe, qu'il décide d'indulger quelque envie ce soir, Gerhard n'était pas celui qui devrait subir la potentielle gueule de bois du lendemain.

Les paroles du gardien, cependant, lui rappelèrent ardemment ce qu'il avait loupé par sa propre couardise. Il ne pouvait qu'imaginer ce qu'il avait manqué, ces souvenirs qui s'étaient créés sans lui, et il n'était pas narcissique au point de vouloir figurer dans les mémoires de tous - c'était une grandeur à la hauteur de l'ego d'Ezekiel, sûrement, il n'irait pas lui demander en tout cas - mais au moins, dans celles de ceux qui comptaient. Comme si sentant cette brève frustration, Vynce ajouta :


- Mais il n’est pas trop tard pour vous y rendre, l’orchestre bat son plein et les danses continueront toute la nuit.


Gerhard lui donna son assentiment d'un humement contemplatif. C'était vrai, la soirée durerait jusqu'aux premières lueurs du jour si les habitants le voulaient. Il n'était pas certain de faire long feu, cependant : minuit c'était faisable, quatre heures du matin moins, et au contraire de Vynce qui pouvait déléguer ses responsabilités à toute la flore de Nitescence, Gerhard ne pouvait pas faire l'école buissonnière - blague voulue - et envoyer un acacia parler à ses patients à sa place.

Il avait envie d'y aller, cependant, de s'amuser un peu. Il n'était pas là depuis longtemps, pas encore très à l'aise avec la foule, mais rien qu'un bain ne pourrait pas régler. Sûrement. Il croyait en la théorie de l'exposition, jusqu'à un certain seuil.


Et de toute façon, Opale se trouvait là-bas. Opale et Gabriel. Il n'allait pas les laisser rentrer seuls, ç'aurait été ridicule, ils vivaient sous le même toit après tout. Voir Opale loin des préoccupations professionnelles et personnelles aussi, était un spectacle qu'il ne voulait pas manquer.


- Oui, je comptais m'y rendre justement, et il n'ajouta pas avant de vous avoir aperçu, parce que ça aurait été interprété comme une accusation qu'il puisait, il n'hésitait pas à l'affirmer, dans une mauvaise foi incroyable. C'était lui, après tout, qui avait entamé la conversation. Pense à Opale, songea-t-il, et au sourire du médecin quand il se rendrait compte qu'ils ne s'étaient pas écharpés sur la plage.

Ou bien il secouerait la tête, exaspéré par son attitude. C'était très probable. Gerhard l'imaginait rouler des yeux, et s'imagina justifier faiblement ses actions par une excuse ou une autre que le médecin pourfendrait d'un seul regard plat. Il grimaça. Que le Nébuleux soit devenu sa frontière morale n'était... pas forcément une bonne chose, mais enfin, on avait tous besoin d'un garde-fou. Sans doute.


Gerhard se racla la gorge. Debout l'un à côté de l'autre, ils devaient avoir l'air de poteaux particulièrement tendus. Comme des épouvantails dans un champ d'asperge, lui fournit son esprit. Silence, lui répondit-il.


- Pas de trouble, dit-il de manière totalement naturelle, c'est bien. Un peu de repos pour vous. Il ne manquait plus qu'il lève deux pouces encourageants pour s'enterrer totalement dans la gêne dans laquelle il avait posé un pied, et ne parvenait plus à se dépêtrer désormais. Je comprends pourquoi vous avez agi comme vous l'avez fait, dit-il brusquement, prenant grand soin à ne pas regarder en direction de Vynce. Je comprends. Vraiment. Mais il y aura toujours cette chose, au fond de moi, qui... aura peur, compléta-t-il intérieurement. Comme un petit enfant apeuré. Comme Opale quand ils s'étaient disputés dans le salon.


Son regard se perdit un temps sur les bambins qui jouaient sur le sable, les lanternes un lointain souvenir dans le ciel. Il aurait pu les confondre avec des étoiles si seulement ses yeux ne savaient pas ce qu'ils cherchaient. La barrière runique qui courait autour de l'île chatoyait doucement à la lueur de la lune : en cet instant, elle n'était pas plus prison que protection, et Gerhard avait envie d'y croire.


- En parlant de trouble. Il n'avait plus envie de parler de ça. Pas maintenant, pas ce soir, alors qu'il voulait passer... Peut-être pas un bon moment, mais un moment agréable. Comme si réveillée par ce changement de sujet, sa blessure à la clavicule le lança. A peine de quoi le faire grimacer, une douleur qui n'avait rien à voir avec celle terrible qui l'avait étreint les premiers jours ; comme il l'avait prédit, elle était à peine un souvenir, mais ce qui le taraudait n'était pas la cicatrice qu'il aurait mais bien les autres qu'Ezekiel pouvait disséminer sur la peau des autres. J'aimerais vous faire part de quelque chose, sur le chemin. Il indiqua le chemin pavé qui ramenait vers Lucent d'un signe sec du menton. Venez avec moi ? était clair, mais il prendrait la route avec ou sans Vynce.
Mer 24 Avr 2024 - 0:28
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Vynce Stanford
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Le silence entre les deux êtres tendus comme deux cordes de contrebasse était pesant. Probablement autant pour Gerhard que pour toi. Ne te confortant aucunement sur ton ressenti et la méfiance qui te fait rester muet voire très peu loquace. Abrégeant même tes réponses sans plus t'étaler que ça, comme tu pourrais le faire habituellement avec quelqu'un qui te met à l'aise. Malgré tout, tu tentes de détendre l’atmosphère. Tu n’as pas envie de conflit ce soir, comme tu as bien vu le geste du colocataire d’Opale pour venir vers toi et entamer une conversation, certes, maladroite, mais un pas vers une potentielle réconciliation, assurément. Qui sait le temps que ça prendra ? Peu importe en réalité, tant que chacun met son égo de côté et agit humblement envers l’autre. Tu sais que c’est un travail difficile et de longue haleine pour certains. Cette pensée t’amène indubitablement à Ezekiel qui, par son âge avancé, cherche à démontrer une certaine sagesse et surtout, par le voeu de toujours vouloir avoir le dernier mot, se montre supérieur et hautain, ne cherchant pas à savoir si l’autre aura raison, son point de vue restera le sien, et s’il peut endoctriner ou prouver qu'il a raison, même quand il a tort et que ses convictions ne sont pas toujours les bonnes, il le fera. C'est bien ce qu'il t’a déjà démontré. Deux jours différents où vous vous êtes croisés et deux salles, deux ambiances. Mais la pédagogie doit être réciproque des deux côtés. Tu es prêt à faire des efforts à écouter, seulement si l'autre en fait aussi.

Tu sirotes tranquillement ta bière alors que tes propos ne sont retenus que par un humement d’approbation. Sentant bien évidemment la tension et la frustration de ton homologue à tes mots. Tu essayes de faire la conversation mais même les plantes sont plus bavardes que lui. Tu as simplement l’impression de parler à un rocher lissé par les intempéries et fatigué par le temps et les nombreux passages.

Ton regard se porte alors vers la plage. Incertain sur la tournure de la conversation. Et tu contemples en silence ces jeunes derrière lesquels se trouve cette étendue vaste de poison salin. Une nouvelle gorgée houblonnée t’apporte au moins du réconfort quant à une entrevue pratiquement stérile, ne portant pas de fruits, voire de légères pousses atrophiées, fânant à peine sorties de leur cosse.

Sans même adresser un regard face à la réponse que te fait Gerhard, tu te contentes de hocher brièvement la tête en glissant ton pouce sur la paroi lisse cristaline presque vide. Toi qui voulait tranquillement siroter ton seul verre alcoolisé de la soirée, voilà que cette conversation t’amène à vouloir t’hydrater et te redonner de l’énergie plus que de raison. Tu as presque envie de la boire cul sec, cette bière et d’en recommander une autre.

Tu es presque persuadé que le fait de dire à voix haute son attention quant à se rendre au centre communautaire aurait tôt fait de terminer cette conversation malaisante. Mais non, il reste là à t’observer, jetant parfois un regard sur l’animation des jeunes sur la plage, coït dans une forme de prise de racine métaphorique à laquelle tu t'attends à la voir devenir réalité.

Qu’attend-il pour s’y rendre dans ce cas ?
 
Tu baisses les yeux sur ton verre et l’agites pour y faire tourner le peu de liquide qu'il contient. Contemplatif sur ce tourbillon ambré qui se forme au centre du contenant. Te faisant penser à une spirale d’or que rien ne peut troubler. Ou à une résistance électrique permettant de chauffer une casserole... Cependant, au raclement imprécis et pataud de Gerhard, tu comprends qu'il cherche à communiquer plus que de raison. Ce n'est pas pour autant que ton regard se porte sur lui. Il est déjà conscient que tu l’écoutes et es attentif à ce qu'il pourrait bien te dire davantage.

Pas de trouble… un peu de repos pour moi… hin !
Je grimace un sourire amer. Un rire bref sans joie quittant mes lippes une fraction de seconde. Je serre les dents dans un sourire absolument pas naturel en fermant les paupières. Mon bras caché sous celui qui tient mon verre remue un peu. Mon poing se serrant légèrement sous la tension que je ressens, beaucoup trop palpable et désagréable pour parvenir à rester naturel.

“On va dire ça…” Ajoutais-je distraitement en retour.  
Le repos je ne l’obtiens que lorsque je me ressource dans le grand chêne. Du reste, je suis toujours aux aguets. Et quand bien même j’entre en osmose avec le vieux chêne pour me reposer, j’ai toujours un regard sur ce qui se passe, pas autant que je le voudrais car la nature ne me transmet que ce que je dois savoir. Ayant porté allégeance à la Matriarche pour être l’un des gardiens de l’île, il est évident qu’elle a le contrôle sur moi aussi et que je ne peux pas faire n’importe quoi. Mais l’entité qui régit la nature ici a mis du temps à me faire confiance et me laisser prendre la main quand il le faut sur cette dernière. Ce fut long, difficile et laborieux et je peine encore parfois, mais je suis parvenu à avoir un lien avec eux. Alors, si l’on devait me sortir de mon repos parce-qu'il se passe quelque chose de grave et que je dois intervenir, je suis le premier à être dérangé pour ça. Je l’ai choisi et ça me convient parfaitement.

Gerhard essaye de se justifier pour son comportement de l’autre jour mais en fait, c’est totalement légitime de sa part. Il n’a donc pas à le faire. Si bien que je le coupe un peu dans son élan de réflexion à voix haute.

“C’était stupide…” mais avant qu'il prenne tes propos comme une insulte de son comportement à ton égard, tu continues. “J’ai été stupide de réagir aussi impulsivement en pensant que quelqu'un voulait faire du mal à un vieil ami. Je n’étais pas serein ce jour-là et j’ai fait une erreur en vous prenant pour une menace…” Ton regard se reporte de nouveau sur lui, solennel et sincère. “Mais merci d’avoir compris. C’aurait pu être n’importe qui à ce moment-là. Je suis désolé de vous avoir effrayé et contrarié.”
Tu n’as pas envie de revenir dessus. Le mal est fait, tu t’es expliqué avec lui. Maintenant le passé est derrière. Il faut savoir mettre un pas devant l’autre désormais. Tu soupires. Détournant le regard vers l’obscurité de la mer, la vue troublée les émotions qui t'assaillent. Tu te contentes de fermer les yeux et boire une nouvelle gorgée. Le silence qui s’installe entre vous semble faire l’effet d’une vague de rédemption entre vous, du moins, tu le ressens comme ça. Avoir exprimé ton point de vue t’a permis de te libérer d’un poids. Maintenant s’il veut continuer d’en parler libre à lui, mais ça n’a pas l’air d’être le cas. Ça n’est pas plus mal en réalité. Tu n’as pas envie de tergiverser des heures pour quelque chose sur laquelle tu t’es platement excusé, encore ce soir. Tu as d’autres choses à penser et surtout, une surveillance à gérer.

Gerhard reprend la parole après un temps de silence. Ses premiers mots t’intriguent et tu fronces les sourcils en détournant le regard pour le fixer. Cherchant à savoir de quel trouble il veut parler. A-t-il rencontré des troubles ou vu des choses ce soir que tu n’aurais pas perçu ? Que la nature a omis de te transmettre ? Ça pourrait être tellement possible, tu n’es qu’un pion, après tout.

À son geste du menton et la suite de ses propos, il t'invite clairement à le suivre. Tu accueilles ce geste d’un froncement de sourcils. Mettant un temps de réaction compréhensif. Méfiant sur ses intentions, tu le jauges, le fixant en silence avant de te décider. Tu avales en quelques gorgées ce qui reste de ton verre, cul sec, avant de le déposer sur le petit rebord et remerciant le propriétaire de la bicoque. Ton pas rompant la distance de Gerhard pour t’approcher de lui et ouvrir la marche à ses côtés. De toute façon, tu comptais retourner au centre communautaire après cette petite pause. Restant toujours attentif à ce que la flore te transmet.

En marchant, ton visage se baisse vers le sol, comme pour écouter les murmures que l'on peut te faire, ta mine un peu plus fermée que jusqu’alors. Tu essayes de capter, de chercher des troubles au cours de la soirée qui auraient pu dégénérer. Questionnant en silence tes congénères qui ne semblent pas avoir été témoins de quoique ce soit pour l’heure. Ou peut-être que Gerhard a pu être un témoin potentiel sur un événement tel que l’épisode du lièvre avant ce soir. Qui sait, le braconnier ayant pu faire d’autres victimes avant ça. Même si tu ne dis rien, tu restes passablement attentif à ce qu’est susceptible de te révéler le brun. Tu glisses les mains dans les poches de ton pantalon, un peu étroites comparé à celles de ton gros blouson que tu n’as pas ce soir. L'invitant dans ton silence à prendre la parole sans le couper.
Ft. Gerhard Speckmann “”


Mer 24 Avr 2024 - 12:40
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Gerhard Speckmann
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Vynce l'avait coupé dans ses excuses - si tant est que ces paroles bredouillées soient des excuses, mais si Opale lui demandait, Gerhard les qualifierait ainsi. Il n'avait pas l'énergie, en cet instant, de prononcer davantage - avec les siennes, prononcées d'une voix solennelle qui reflétait toute son expérience passée à gérer les autres, et les conflits. Pour une raison ou une autre, cela irritait Gerhard. Ce n'était pas qu'il aurait souhaité une dispute, mais...

Heureusement qu'Opale n'était pas là. Il devait danser de tout son saoul au centre communautaire, étranger à la confrontation étrange autour de laquelle s'articulaient ses deux amis. Peut-être même qu'il avait bu, comme Vynce actuellement, assez pour détendre ses épaules qui, ces derniers temps, étaient constamment remontées au niveau de ses oreilles. Gerhard savait qu'une paix tacite était le mieux pour tout le monde, mais une partie de lui-même aurait voulu pouvoir déverser un peu de son venin. Vynce aurait-il accusé le coup ? Il avait cet air austère, calme de la tête aux pieds ; sûrement n'aurait-il pas bronché, ne serait-ce que pour la satisfaction de se dire que sur ce point-là également, il lui était supérieur.

Gerhard savait qu'il cherchait la petite bête. Qu'il était bien mieux de la laisser sommeiller. On pouvait arguer qu'on ne se maîtrisait pas sous la colère, ses gestes ou ses mots, mais ç'aurait été mentir : celle de Gerhard ne sommeillait jamais très loin, à peine éteinte, sa seule arme, et où l'avait-elle menée ? Nul part de bon. Dans les ennuis, à chaque fois.


Alors il inspira, laissa couler. Le temps guérissait tout : il devait croire en cette maxime, au moins pour lui. Vynce avait son pardon, lui avait offert le sien en retour. Si Gerhard ne l'empoignait pas à pleine main, le considérait au contraire comme une sorte de cadeau dont on ne pouvait se départir, c'était bien son problème. Personne n'avait à être au courant. Du reste, ce n'était pas comme s'il irait chercher sa compagnie. Pas maintenant, en tout cas, et peut-être jamais ; ça aussi, ça le regardait.

Vynce avait jaugé sa demande avec les sourcils froncés. En train de se demander, sûrement, si Gerhard ne le menait pas en bateau. Ce n'était pas impossible, mais Gerhard avait vingt-sept ans, était fatigué, voulait aller danser ; et les bandages qui recouvraient sous sa clavicule frottaient son élégante chemise de telle sorte à ce qu'il ne puisse pas oublier la blessure qui se cachait en dessous. Chaque matin il vérifiait la progression de la cicatrisation. Il dressait ces croûtes en croissant, grimaçait en les sentant gratter contre la gaze. La plupart du temps, la sensation disparaissait, noyée parmi tant d'autres tandis ce qu'il s'occupait les mains et l'esprit.

Il l'avait invoqué, ou plutôt avait invoqué les circonstances qui avait conduit à son apparition, et toutes ces escarres pulsaient au rythme de son coeur battant. Autant qu'il détestait l'avouer, Gerhard dépendait plus de Vynce que l'inverse en cet instant. Il serra et desserra les poings, crut reconnaître une pointe d'anxiété percer son agacement face à ces longues secondes qui s'écoulaient inutilement ; serra les dents quand il la sentit se dissiper au hochement de tête décidé de Vynce. Le gardien écouterait ce qu'il aurait à dire.


Vynce le rejoint et ensemble, ils prirent la direction du centre communautaire. Les talons de leurs chaussures formelles claquèrent sur les pavés de Lucent : la musique leur parvenait, distordue, mais au fur et à mesure qu'ils parcourraient les mètres, elle deviendrait plus forte, ôterait de ses mains la moindre chance de parler. Le gardien se calqua sur son rythme, que Gerhard garda délibérement plus lentement qu'à l'accoutumée. Il avait de longues jambes et avalait les mètres aisément ; cette cadence d'escargot ne lui seyait guère, mais il ignorait combien de temps il lui faudrait avant de trouver les bons mots, de les délivrer à l'air libre.

Il ne comptait pas accuser Ezekiel de plein fouet. L'humiliation était déjà assez cuisante sans qu'il ne traîne Vynce dedans. Trop de gens étaient au courant, trop, en tout cas, pour lui. Sa fierté avait pris un coup dans cette mer qui s'était teintée de son sang. Ezekiel l'avait ramené sur le rivage et Gerhard ne s'était jamais autant senti enfant qu'en cet instant, dépendant d'un homme aux humeurs imprévisibles. Quand il considérait cet instant aujourd'hui, il se rendait d'à quel point sa vie avait tenu à un fil. Dans une réalité alternative, il ne doutait pas que son corps flottait au large, picoré par la faune sous-marine. L'affaire aurait pu rester là, mais il y avait eu Gabriel dans la cuisine - y repenser le rendait un peu trop rouge - et, plus tard, Opale. Trois personnes qui savaient la vérité derrière la constellation creusée dans sa peau. Hors de question qu'il en ajoute une autre. Vynce devrait se contenter d'une semi-vérité mais, songea Gerhard en lui jetant un coup d'oeil qu'il voulait désinvolte, le gardien n'allait pas protester. Il avait l'air d'une personne assez peu encline à pousser au-delà du raisonnable.


Ils passaient les premières maisons quand Gerhard se força à dire quelque chose : Vynce s'était muré dans un silence entêtant duquel il semblait déterminé à ne pas sortir par lui-même. Gerhard, qui avait l'habitude de faire parler les autres - c'était son métier, après tout - fut le premier à perdre patience.


- C'est un Nébuleux, souffla-t-il entre les notes qui rebondissaient entre les murs des rues, et je ne veux accuser personne, bien entendu, mais il est... Il hésita. Opale avait beau s'être excusé pour ses propos, Gerhard ne les avait pas oublié, et l'attitude de Vynce le cimentait dans ses convictions : que pour nombre de Nébuleux, c'était eux contre le monde, ou plutôt eux contre les humains. Vynce était peut-être un très bon gardien, mais accepterait-il un blâme contre un des siens, venant d'un homme qui, deux semaines avant, avait réussi à le chasser de sa maison grâce à la seule force de sa mauvaise humeur ?

Il devait y croire. Son rôle se limitait à celui d'un messager, qu'il le veuille ou non : Vynce pouvait bien déchirer le message si ça lui chantait, Gerhard s'en rinçait les mains.


- C'est un Nébuleux, arrivé un peu avant moi, vous devez le connaître. Il s'appelle Ezekiel. Il s'interrompit un instant, comme si craignant que l'homme en question ne surgisse au coin de la rue : mais évidemment, il n'y avait personne, et Gerhard souffla, agacé contre lui-même. Les becs de gaz projetaient de vives lumières sur les murs, personne ne sortirait des ombres.

Il continua à les guetter, néanmoins, juste par précaution, et reprit : Je ne peux pas tout vous dire mais il a eu quelques... propos, lors d'un rendez-vous médical, qui m'ont interpellé. Pour ainsi dire. La directrice de l'école est au courant, à demi-mot, et j'aurais voulu me tromper, mais—

Gerhard se pinça l'arête du nez. Il se rendait compte de la faiblesse du dossier en même temps qu'il parlait : des mots que l'on disait chez le psychiatre, ce n'était pas des preuves, à peine de quoi paniquer. Quoiqu'il fasse, il en revenait à cette soirée, cette mer.

- J'ai cru voir quelque chose. Sans doute. Sa clavicule lui rappela qu'il n'y avait aucun doute. Il évita avec un soin tout particulier de se l'empoigner. C'était un réflexe qu'il avait commencé à prendre, à son plus grand dam. Peut-être que ce n'est rien. Mais il ne m'a pas l'air très stable, pas très... Enfin. Source de trouble, comme je vous l'ai dit.


Vynce avait fourré ses mains dans ses poches, et Gerhard l'imita. Celles de son pantalon étaient larges, il avait aisément la place pour y caler ses mains, laisser ses doigts s'abandonner aux tremblements à peine perceptibles qui les avait pris. Il n'avait rien d'autre à dire, rien qui ne l'incrimine davantage comme un protagoniste d'une affaire qui ne concernait qu'Ezekiel et lui. Il n'avait plus qu'à espérer, désormais, que cela suffirait à Vynce : pas pour agir, mais au moins pour être plus attentif. Quelque part, songea-t-il sombrement, il lui donnait du boulot ; mais ça, il n'était pas certain que le gardien apprécie.
Mer 24 Avr 2024 - 16:33
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Vynce Stanford
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Vynce Stanford
EVENT ▬ Rancune tenace
Et les dents si longues qu’elles râclent le sol
Tes pas se calent à ceux de ton acolyte. D’extérieur, vous ressemblez à deux compères marchant ensemble vers la salle des fêtes, en entrant dans le cercle de confidence, il n’en n’est rien. Tu pressens cependant que si même Gerhard vient enterrer la hache de guerre entre vous pour te parler de troubles, c’est que ça peut avoir son importance. Après tout, c’est le psychiatre de l’île. Au même titre qu’Opale il peut être susceptible de déceler des âmes déviantes qui peuvent être prises en charge rapidement afin d’étouffer le danger dans l'œuf. Tu n’es pas bavard pour un sou. Attentif et surtout sur la défensive, aux aguets et méfiant, pas seulement de ton voisin de marche, sur ce qui se passe autour. Peut-être veut-il t’emmener dans un piège, une embuscade, qu’en sais-tu ? Peut-être veut-il tout simplement te parler et tu espères que c’est cette deuxième option

À force de mutisme, il finit par rompre le silence en premier. Ce que tu attendais depuis le début de votre balade en réalité. Même si tu ne lui as pas demandé directement, tu voulais qu'il ouvre la conversation sur ces fameux troubles. Tu regardes devant toi, les premiers mots ont tôt fait de te faire froncer les sourcils. Un nébuleux… Là encore tu te fais des hypothèses, des séries et des films sur de potentielles agressions ou juste, des mots, menaces ou tentatives indirectement annoncées. Ton esprit revient indiciblement sur l’épisode du lièvre. Tu revois la zone où tout s’est passé puis, derrière ces buissons humides, l’homme en tenue de camouflage, gisant dans une flaque, inerte. Les plantes n’ayant rien dit à ce sujet là tu ne t’en es pas préoccupé, pire, tu as préféré sauver la vie du lièvre plutôt que celle du braconnier, quand bien même tu le pensais déjà loin, ayant fui les lieux avant qu'il ne vous retombe dessus. Ezekiel te revient en mémoire, prêt à mettre fin à la vie du lièvre, comme il fut responsable de la mort du braconnier. S’il n’avait pas été assommé par le coup du dragon, il ne serait pas tombé le nez dans cette flaque pour s’y noyer.
Une mort stupide, assurément.
Mais un être a tout de même perdu la vie alors que les dégâts auraient pu être encore moindres. À l’aura du nébuleux, tu savais dès votre première rencontre qu'il est un prédateur dangereux, sa présence te tend autant qu’elle te fascine, pour la simple et bonne raison que tu te méfies de lui, que tu redoutes le jour où il cherchera réellement à tuer ou détruire. Et parce-que la flore n’a pas confiance en ce dernier, elle t’intime avec conviction de te méfier de l’Eau qui dort. Au début du récit de Gerhard, tu espères sincèrement que ça ne soit pas de lui qu’il s’agisse. Oui, tu l’espères sincèrement…

La suite frappa avec force dans ton crâne. Devoir le connaître… Ezekiel. En dépit de tout ça, tu fermes les yeux. Révélant sur ton faciès, jusqu'alors impassible, un air blasé et dépité. Tu pinces les lippes et sors ta main valide pour venir pincer l’arête de ton nez. Tu retiens cependant un lourd soupir. Comme si le dragon n’était pas assez impliqué comme ça. Une affaire de plus commence à lui ajouter des casseroles supplémentaires au cul comme on emporte des mariés pour leur célébration. Tu t’arrêtes en sentant le mouvement similaire de ton comparse et redresse la tête. À en voir les coups d’œil et l’attitude de Gerhard, tu sais qu'il n’est pas serein de parler de ça avec toi. Encore plus dans les rues de la ville. Tu ciles en silence tout en l’observant longuement, inutile pour toi de regarder alentour, il n’y a personne hormis un couple qui se bécotent dans un angle de rue sombre quelques rues plus loin. Beaucoup plus intéressés par leur effervescence sexuelle que le reste.

Ton visage se redresse et ta main glisse jusqu'à tes lèvres, glissant la tranche de ta seconde phalange contre dans une mine de réflexion. Ton regard se pose alors sur le brun. La marche reprend, plus lente encore. Ta main va retrouver la poche qu’elle a abandonnée plus tôt.

Tu l’écoutes te parler de ses doutes, doutes qui se révèlent un peu plus. Car depuis l’épisode du lièvre, tu te méfies d’Ezekiel comme jamais. Tu étais tellement en colère ce jour là, contre ta stupidité, ton impuissance pour ne pas avoir réagi assez tôt et avoir tenté d’aider le braconnier, tellement en colère contre toi de l’avoir retrouvé mort et d’entendre intérieurement le rire d’Ezekiel frapper contre tes tempes si tu étais venu le retrouver le soir même pour lui dire ce qui était arrivé. Au lieu de ça, tu en as fait part à la Matriarche, inutile de te rendre chez elle, tu sais qu’elle est omnisciente et capable d’entrer dans la tête des gens comme elle le souhaite. Ta colère ne s’est pourtant pas dissipée après ça, tu as fait en sorte de surveiller le professeur, sans forcément être réellement présent. Mais ce jour-là tu étais sur la falaise qui surplombait la plage quand tu l’as vu avec un homme en train de nager. L’homme, tu n’étais pas certain de son identité, quand bien même tu as une excellente vue, tu étais trop loin pour bien les distinguer, Ezekiel ne passe pas inaperçu avec ses cornes. Tu es resté, immobile, invisible, prêt à intervenir si ça tournait vraiment mal. Chose que tu n’as pas fait car ta directive était d’observer, seulement observer le Nébuleux, t’assurer de ce dont il pouvait être capable. Intervenir seulement si ça devenait critique ou dangereux. Quitte à te sacrifier pour sauver une vie tu l’aurais fait en bravant cette crainte de l’eau de mer.

Cet épisode, tu te gardes bien de le dire au psychiatre. Te demandant s’il s’agissait de lui ce jour-là ou de quelqu'un d’autre. Ou si ça avait pu se passer dans le bureau du brun dans lequel tu ne peux être témoin, dans lequel tu n’iras de toute évidence pas sans autorisation. Tes poings se serrent dans tes poches et ta mine se renfrogne, ton regard devient deux billes glaciales. Voilà, la colère remonte encore. Pour l’heure, tu es profondément marqué par le nébuleux qui t’a clairement clashé et bafoué d'une manière ou d’une autre. Piétinant tes convictions profondes avec les siennes qu'il pense absolues et justes. Alors, tu te décides enfin à prononcer quelques mots en retour.

“Est-ce que… Ezekiel vous a fait du mal, Monsieur Speckmann ?” Tu t’arrêtes, te tournant vers le brun avec un air dur et froid. Non dirigé contre lui, mais indirectement en colère contre le professeur. “Est-qu’il a tenté de vous faire du mal ou vous a proféré quelconque menace ? Une quelconque tentative, même se voulant être un jeu amical ?” Le ton était franc, net, cinglant.

Tu répétais tout en observant ton homologue dans le but de déceler une ouverture sur un semblant de vérité affirmant les doutes que Speckmann aurait pu avoir à son sujet. Tu sais que les suivis psychiatriques sont pour les personnes troublées ayant besoin d’une aide, d’une main tendue pour remonter la fosse obscure dans laquelle ils sont tombés, d’une lumière capable de les guider sur la bonne voie. Tout ça, dans le but d’améliorer le mental de l’individu cherchant à se faire soigner. Du moins, c’est ce que tu as appris à l’armée. Les suivis post-conflit ne sont arrivés que sur le tard, peu de temps après la première guerre mondiale, afin d’aider les soldats pris de démence ou de traumatismes lourds en rentrant des champs de bataille. Tu y as eu le droit aussi en perdant ton bras. Mais pour toi, c’était une perte de temps. Tu avais beau raisonner comme un humain, la thérapie qui t’a le plus aidée fut celle du lien que tu entretiens avec tes congénères et rien d’autre. Les Ephémères ne peuvent comprendre ou tenter d’aider les êtres qui ont vécu plusieurs vies, plusieurs générations.

Tu te demandes ce qu’aurait eu à y faire Ezekiel lors de leur entretien. Venait-il voir Gerhard dans le but d’obtenir de l’aide ? Ou simplement pour se jouer de lui ? Tu te le demandes vraiment. Mais tu partirais plus sur la deuxième option, pas certain que le professeur ait besoin d’un soutien psychiatrique quelconque. Mais qui sait, Gerhard et lui sont peut-être de mèche, peut-être qu'il te pousse à aller voir Ezekiel pour le punir ou pire. Faire une erreur qui te retomberait dessus. Non, il ne faut pas entrer dans le jeu de qui que ce soit. Cependant tu entends les propos et les doutes du psychiatre. Tu comptes faire un peu plus attention à lui, au professeur et surtout à Opale. Ils se connaissent tous les deux également, tu crains que le dragon lui fasse également du mal si les propos de Gerhard s’avèrent vrais. Pour le braconnier, même si tu es en colère, tu ne te prononces pas, il l’a tout de même cherché en tirant une flèche sur le dragon, le blessant par la même occasion.

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Mer 24 Avr 2024 - 19:58
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Gerhard Speckmann
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Son avertissement avait semble-t-il fait mouche. Il était inquiétant de se rendre compte de l'influence d'Ezekiel, tout comme il était rassurant, d'une certaine manière, de savoir qu'il n'avait pas été choisi comme bouc émissaire du Nébuleux. Comment avait-il pu franchir le port ?

Nul besoin de creuser si loin, à dire vrai. Ezekiel jouait la comédie à la perfection, si bien que Gerhard ne doutait pas qu'il y avait quelque once de vérité qui perçait le brouillard de mystère dans lequel s'était enveloppé le Nébuleux. Gerhard voulait croire en l'affection dont il avait fait preuve envers ses jeunes élèves sur la plage, le geste presque paternel qu'il avait esquissé en ébouriffant les cheveux d'Eline. La jackalope s'était confiée à lui, dans son petit cabinet du centre communautaire, sur la présence rassurante d'Ezekiel. Le professeur, avait-elle dit, l'avait incité à sortir de sa carapace, elle souriait davantage depuis qu'il était là. Ses leçons étaient engageantes, édifiantes, il n'était pas avare d'éloges tant qu'on les méritait.

Tout cela devait dire quelque chose ; tout comme cette agressivité sous-jacente, ces gestes teintés de colère. Un désir de tout maîtriser, que les choses se déroulent selon son bon vouloir, quitte à les forcer à aller dans la bonne direction. Ezekiel soufflait le chaud et le froid, mais naviguait si rapidement entre les deux extrémités qu'on ignorait toujours sur quel pied danser. Gerhard ne voulait pas le croire irrécupérable.

Il ne savait pas, également, quoi faire pour aider quelqu'un qui se complaisait dans sa propre situation. Ezekiel manipulait avec grand plaisir. Un joueur d'échec qui préparait ses coups trois tours à l'avance, avec la tranquilité qui allait avec la connaissance que la défaite était si peu probable qu'elle en devenait quasiment impossible. Il était arrogant ; parce qu'il l'avait, à un moment ou un autre de sa très longue existence, mérité. Gerhard croyait que la guerre était évitable, mais ne pouvait se permettre de parier toute une île sur cette mince éventualité.


Entrait donc en scène Vynce, dont la solennité avait fondu comme neige au soleil. Gerhard le regardait, son visage carré, une grimace fixée sur ses traits ferme. Colère, reconnut-il, frustration : il l'avait entendu, écouté, et quelque connexion s'était faite sous ces cheveux blonds que les lumières de la ville faisaient briller dans la nuit. On aurait pu le croire auréolé, mais la détermination froide qui traversa ses prunelles - celle d'un homme qui se résolvait à agir peu importe les désirs du destin - ne seyait guère à l'adjectif. Le gardien s'arrêta, et Gerhard l'imita, ses semelles manquant de déraper contre les pavés dans l'empressement.


- Est-ce que… Ezekiel vous a fait du mal, Monsieur Speckmann ? Les mots étaient prononcés avec un soin tout particulier, comme si Vynce reconnaissait la délicatesse de ce qu'il demandait. C'était le cas, il était peut-être naïf - benêt aurait été trop méchant - mais pas idiot, malgré tous les efforts de Gerhard pour se persuader du contraire. Il s'était figé, la question l'avait sonné. Comment avait-il su ? Savait-il seulement ? Non, sûrement pas, ou bien—

Qu'est-ce qui l'avait trahi ? Gerhard ne pensait pas être illisible, mais il avait cru que ses paroles vagues auraient dissuadé Vynce de creuser le sujet. Que le gardien prenne son air hautain pour la barrière qu'il était, qui l'avait protégé, un temps seulement, des pièces les plus vicieuses de Nitescence.

C'avait été utopique. Gerhard se sentait stupide ; stupide, et attaqué, bien qu'il ne doutât pas que Vynce n'en ait pas eu l'intention. Est-ce que Ezekiel vous a fait du mal, et tout ce qu'il entendait c'était Êtes-vous si fragile que ça, monsieur Speckmann, prononcée dans cette voix cristalline qui n'appartenait pas à l'homme qui se dressait devant lui.


- Est-qu’il a tenté de vous faire du mal ou vous a proféré quelconque menace ? Une quelconque tentative, même se voulant être un jeu amical ?

Gerhard se tendit encore davantage. Il avait l'impression d'être pris pour un imbécile. Le petit enfant que l'on grondait. Pourquoi te plains-tu, alors que tu as été averti ?

Il avait pleuré dans le giron de sa mère une fois, enfant, son nez avait été cassé, il avait mal, il sanglotait l'injustice qui avait déformé son profil de manière permanente ; sa mère avait flatté ses cheveux corbeaux qu'il avait hérité de ce père inconnu, avait soufflé quelque comptine dont il se souvenait à peine des paroles, et lui avait dit avec le ton le plus doux du monde Je te l'avais bien dit, Gerhard, que le monde te veut du mal. Pas de réconfort, juste la certitude qu'elle avait été confortée dans ses dires. Gerhard se fichait de la cicatrice qui affublait son visage, mais les mots, cette tranquilité qui les avait teinté, il s'en souvenait comme si c'était hier.


Vynce n'était pas sa mère, dieu merci, mais le ton restait le même, et Gerhard n'avait plus dix ans il en avait vingt-sept, et il n'avait pas besoin de quelqu'un pour lui dire qu'il avait été stupide, merci bien. Il se suffisait très bien.

Il souffla trois fois, ne quittant pas Vynce des yeux, trois fois et pas une de plus. Il savait pertinemment que cacher des choses au gardien de l'île, le seul à même de lui venir en aide, était idiot. Il savait aussi qu'il ne résisterait pas face à la pitié qui lui serait offerte.

- Tout ce qui s'est passé entre monsieur Oldenbourg et moi nous regarde, dit-il fermement, cracha-t-il presque ; s'il garda la colère de sa voix, il savait qu'elle devait miroiter dans ses yeux. Elle montait si vite quand Vynce était concerné ; un résidu de peur, sûrement, l'humain avait parfois des allures d'animal blessé, que ce soit physiquement ou mentalement.

Peur, et autre chose. Il repensa à la manière dont Opale avait étreint le gardien, et inspira profondément. Oh, autre chose de très identifiable. Son propre problème, encore une fois. Quelque chose tirait sa chemise : Gerhard se rendit compte, avec consternation, que sa main avait migré à sa clavicule. Il jura intérieurement, mais la retirer aurait alerté Vynce qu'il cachait quelque chose, et pire qu'il cherchait à cacher quelque chose. Il ne faudrait pas être un génie pour comprendre quoi. Qu'il la laisse là et que Vynce croit qu'il croisait le bras pour se protéger de son regard de braise.


- Nous avons échangé des mots, reprit-il plus posément, mais pas moins décidé, certains plus courtois que d'autres. Cela ne change rien à ce que je vous ai dit. Surveillez-le ou pas, cela vous regarde. Et je me garde ce que je fais avec monsieur Oldenbourg.

Il espéra que Vynce ne creuserait pas davantage l'affaire. Peut-être que si, après tout il en avait le temps : si Gerhard estimait correctement la distance qui les séparait du centre communautaire, il leur restait bien une petite dizaine de minutes de marche, et il comptait dans ce calcul la foule qui s'épaissirait au fur et à mesure qu'ils approcheraient du centre de la fête. Il n'avait pas cru que Lucent était aussi peuplée, mais Nitescence lui révélait encore bien des surprises.

Se détournant complètement du gardien, Gerhard acheva finalement cette conversation par une réassurance qui, il l'espérait, suffirait à apaiser ses envies de jouer les chevaliers servants :

- Restez assuré que vous serez mis au courant du moindre trouble. Vous empêcher de faire votre travail n'est dans l'intérêt de personne. En attendant, j'ai le mien, et mettre au clair une partie de la situation avec monsieur Oldenbourg rentre dans mes missions.

Il évita de dire qu'il n'accueillerait pas Ezekiel dans son bureau avant longtemps. Au moins jusqu'à ce que sa clavicule soit cicatrisée. Il avait un peu de répis devant lui.

Penser à tout un plan alambiqué pour contrecarrer l'esprit disparate d'un seul Nébuleux le fatiguait plus que nécessaire. Il n'était pas censé y penser : c'était soirée de fête, que diable, il y réfléchirait demain, avec sa migraine et ses pensées sombres pour compagnes, et dans le refuge de son officine. Se remettant à marcher, Gerhard pressa davantage le pas en direction du centre communautaire. Il avait envie de voir Opale, certain que la vue de son colocataire suffirait à apaiser, au moins un instant, son agitation. Il pensait en avoir bien besoin.
Jeu 25 Avr 2024 - 15:17
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Vynce Stanford
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Ezekiel n’est pas à prendre à la légère, je le sais depuis le début. J’ai pourtant tenté d’être bienveillant et agréable avec lui. Mais je ne peux mettre mes sentiments de côté quant à la méfiance ou la tension que je ressens en sa présence, sans compter la nature de l’île qui se méfie éperdument de ce dernier. Et puis, il y a eu cette histoire avec le lièvre, si ce dernier a survécu, le braconnier à l’origine de tout ça n’a pas eu la même chance, et cet état de fait est là. Quand bien même c’était de la légitime défense, je suis bien conscient que le professeur est capable de bien pire, il suffit de sentir l’aura qui se dégage de lui, de son ancienneté sur Terre également. Personne ne ressort complètement sain d’esprit après autant de temps, même moi, avec mon petit âge de deux générations, voire trois, je n’en suis pas ressorti indemne. Beaucoup de choses m’ont marqué, beaucoup d’événements ont failli me rendre fou également. La Matriarche peut et a raison de se méfier de lui comme je m’en méfie. Et d’avoir vu sur cette plage cet homme aux prises du dragon ne m’a pas conforté dans le fait de lui laisser du répit.

Je compte encore le surveiller et m’assurer qu’il n’arrive rien de grave, mais les plantes ne peuvent pas être partout, seule la Matriarche est omnisciente à l’île et si je peux avoir un peu plus de détails sur ce qu’il a pu faire contre Gerhard, ça m’arrange encore plus. Mes questions pour le psychiatre tombent, si ma colère n’est pas tournée contre lui, c’est pour Ezekiel et sa énième tentative de blesser quelqu’un ou d’attenter à la vie du colocataire d’Opale qui m’inquiète et fait que mon regard devienne glacial. Ce n’est aucunement une réprimande pour lui, ça m’inquiète d’autant plus qu’Opale est en danger en présence du professeur et le savoir seul avec lui, même dans un lieu public ne me rassure absolument pas.

Mon regard froid sur le psychiatre lorsque ma question tombe, je le vois se figer, inexpressif, un silence qui semble confirmer certains faits, son mutisme ne me laissant pas indifférent, je reconsidère ma question pour la formuler d’une autre manière. Si Ezekiel a effectivement fait du mal à Gerhard, je ne vais certainement pas laisser passer ça.

Mais son regard change, si son visage n’en montre rien, j’ai assez longtemps appris à observer les regards pour comprendre que mes questions l’indisposaient suffisamment pour le braquer. Ça se sent dans la tension qui se fait même s’il veut paraître détendu. Je garde pourtant les mains dans les poches, mon regard le toisant sans ciller un seul instant, attendant une réponse de sa part. Presque certain que je n’en n’aurais pas de concrète vu le regard qu’il me lance. Qu’est-ce qui lui passe exactement par la tête ? Je n’en sais rien et je ne suis pas persuadé de vouloir les entendre. Son souffle à trois reprises me fit savoir que mes questions venaient potentiellement de l’agacer ou le braquer sans que je ne comprenne pourquoi. Est-ce qu’il pense que je me moque de lui ?

Sa réponse me fit froncer un peu plus les sourcils. Pourquoi me raconte-t-il donc tout ça si c’est pour ensuite se braquer et me dire que ça ne me regarde pas, ce qui se passe entre Ezekiel et lui ? Je ne comprends pas la manœuvre, ni même la démarche de m’en parler dans ce cas. Alors oui, je cille un peu en lui lançant un regard teinté d’incompréhension. Penchant légèrement le chef en le secouant brièvement. Ce qu’il ajoute ensuite me laisse songeur et perplexe. Je continue de le fixer sans bouger ni même le lâcher du regard. Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez cet éphémère ? Il donne l’impression qu’il cherche la rivalité ou quelque chose du genre. Son regard empli de colère est tout sauf correct et son comportement est potentiellement incompatible avec ce qu’il a dit plus tôt. Je peux comprendre la méfiance qu’il peut avoir à l’égard du professeur, mais si je n’ai pas plus de détails, merci, mais c’était absolument inutile, juste me conforter dans le fait de garder un peu plus un œil sur ce dernier et savoir que je ne suis pas le seul membre de l’île à être sur mes gardes en sa présence.

“Merci pour cette sommation absolument stérile dont je me serais bien passé, Monsieur Speckmann. Je ne vous ai pas vraiment attendu pour le surveiller. Mais j’ai l’impression que mes questions vous ont braqué alors que ça n’était pas le but. Effectivement, ce qui se passe entre lui et vous ne me concerne et ne me regarde pas. Mais qu’il vous ait potentiellement menacé ou violenté pendant une séance peut être à prendre en considération et des mesures le concernant peuvent être prises. Dans un cadre plus intime entre vous, je n’en n’ai cure et me passerais des détails, merci.”

Tu balayes la main droite dans un geste bref en la levant devant ton visage tout en fermant les yeux et lâchant un soupir, agacé par le comportement de ton homologue. Te détournant vers le chemin menant au centre communautaire. Mettant un terme au fait qu’il ne veuille pas interférer dans ton travail. Cependant, c’est exactement le comportement qu’il a en refusant de donner certains faits, s’il a été blessé ou non par le professeur. C’est son choix, mais sa façon de se comporter te conforte dans le fait qu’Oldenbourg ait potentiellement blessé le psychiatre d’une quelconque façon.
“S’il vous a blessé d’une quelconque manière vous saurez qui trouver de toute manière, je ne me fais pas de soucis pour ça. Ayez au moins la décence de ne pas vous brouiller vous-même dans votre comportement à mon égard. Votre rancœur est palpable à des kilomètres. J’en conçois, je me suis excusé, à plusieurs reprises, encore ce soir, mais vous me parlez d’une potentielle menace et ce n’est pas un jeu d’égo ou d’humiliation qui se joue là, Speckmann. Je ne cherche pas à vous provoquer, vous mettre au pied du mur ou encore vous pousser dans vos retranchements, je cherche juste à avoir des informations et m’assurer qu’il ne vous ait été fait aucun mal. Mais merci, vous m’avez conforté dans le fait de ne pas être le seul à me méfier de ses manigances. Je le surveille d’assez près et pour ça je n’ai pas besoin d’être réellement sur place pour considérer certains agissements de sa part. Sachez-le.”

Ta main retrouve sa poche, t’apprêtant à reprendre la marche calmement en présence du psychiatre. Même si sa présence te met mal à l’aise, tu as mis un point d’honneur à t’expliquer et tenter de crever l’abcès entre vous. Tant pis s’il se renfrogne dans le silence après ça, tant pis s’il t’en veut encore plus. Tu n’es pas là pour jouer à qui aura la plus grosse paire de balloches ou le plus long chibre, c’est bien un comportement typiquement humain ça. C’est harassant.
“Soit, si vous pensez réussir à explorer plus en détails de potentiels troubles chez le professeur, libre à vous de les découvrir et de venir m’en faire part, mais, par pitié, cessez de penser que je vous veux du mal ou que je cherche simplement à écraser votre dignité. Je m’inquiète autant pour vous que pour tous les autres habitants de cette île, quand bien même on ne peut pas s’entendre tous les deux. Vous êtes le colocataire d’Opale, il est mon ami et je ne veux pas qu’il souffre de notre différend ou d’une quelconque tension nous concernant. Et si pour ça je dois rester loin de lui quand vous êtes dans son entourage pour ne pas qu’il ressente votre envie de me tuer avec vos regards noirs, je le ferais. Opale a besoin d’un soutien, autant physique que moral, pas qu’on le plonge dans les ténèbres, il en a assez souffert. Même si j’aimerais être là également quand il en aura le plus besoin, j’espère sincèrement pouvoir lui rendre la pareille pour l’appui qu’il m’a apporté quand je suis arrivé ici. J’attends aussi que vous comprendrez, à force, que je n’ai rien contre vous ou votre présence auprès de lui.”

Tu n'es pas rancunier ni jaloux. Tu n’as juste pas envie qu’Opale soit peiné par ta relation conflictuelle avec Gerhard, et encore plus qu’il se détourne de toi à cause de cette erreur à son encontre. Tu ne veux plus le voir en colère ou triste. Tu tiens à Opale, c’est indéniable et tu as plusieurs fois éprouvé de l’amour pour lui, tout comme tu aimes d’autres personnes de cette île, tu veux les protéger. Tu sais que le temps guéri certains maux, certes, pas tous, mais le temps change les pensées et les gens également, et si tu dois prouver à Gerhard que tu n’as aucune intention de le nuire tu le feras et tu feras en sorte qu’il finisse par se faire à cette idée.

Ft. Gerhard Speckmann “”


Mer 1 Mai 2024 - 17:18
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Toujours le grand sire. Toujours raisonnable, sauf quand il ne l'était plus ; sa voix vacillait, et Gerhard avait la sombre satisfaction de savoir que c'était lui qui avait instauré ces quelques filets de ressentiment. Monsieur Stanford prenait peut-être le monde de haut mais au moins l'aurait-il rabaissé de quelques centimètres, ne serait-ce que dans son esprit.

Il était bienheureux qu'Opale ne soit pas là pour les voir. Le calme était fragile. Gerhard repensait à ce qu'il lui avait dit - nous ne sommes pas fait pour la paix - et trouva à cette phrase quelque forme prophétique. Il avait été quelqu'un de mesuré, dans une autre vie ; mais cette île tirait les choses les plus hideuses qui avaient pris forme en lui, les ramenait à la surface, le forçait à les porter sur ses manches comme des parures de guerre qu'il aurait dû laisser sur le pas de la porte. Il n'y avait que le souvenir du médecin, de ce qu'ils s'étaient dit à demi-mots, et tout ce qui était resté sous silence, qui retenait Gerhard de déverser sa verve en pleine rue. Pas moyen d'accuser l'alcool : tout cela sortait de sa bouche, sans artifice ni prétexte, et sans doute serait-ce ce qui le précipiterait dans l'abîme si seulement il se laissait aller à de tels sentiments.

Il creusa dans ce calme qu'il savait avoir en lui, un sang-froid qui pour l'instant lui échappait, mais le raisonnable avait sauté par la fenêtre, le laissant tremblant d'indignation. Ce n’est pas un jeu d’égo ou d’humiliation qui se joue là, Speckmann. Je ne cherche pas à vous provoquer, vous mettre au pied du mur ou encore vous pousser dans vos retranchements, je cherche juste à avoir des informations et m’assurer qu’il ne vous ait été fait aucun mal. La bonne blague ! Si Gerhard voulait être cruel - et assurément, il voulait l'être, l'envie battait à ses tempes, à moins que ce ne soit son pouls surexcité à l'idée d'une bataille qu'il n'aurait dû mener - il aurait pu lui dire que la présence même de Vynce lui faisait mal. A voir son air suffisant et ses moues insupportables. C'était pire quand vous étiez le seul à vous énerver, pire encore quand vous affrontiez un paragon de justice et de bienséance. Comme souvent, Gerhard se lançait dans des batailles qu'il ne pourrait gagner, et comme toujours c'était de son dû.


Il serra les poings plus forts, y engrangea là toute sa rage. Il ne voulait plus regarder Vynce ; il devrait se le coltiner jusqu'au centre communautaire, idiot qu'il avait été à l'inviter dans sa brève promenade, mais s'il détournait les yeux il trouvait qu'il était presque capable de l'ignorer. Ignorer sa présence immanquable à ses côtés, un type qui planerait au-dessus de ses jours jusqu'à sa mort. C'était peut-être là sa punition pour avoir blessé Opale : que son gardien hante chaque recoin de sa vie jusqu'à la fin, et même au-delà. Vynce était si grâcieux, si magnanime ; il serait capable de poser une fleur sur sa tombe, et Gerhard serait capable de surgir de son cercueil pour en bouffer la racine. L'humiliation était bien assez cuisante sans qu'elle ne dure des millénaires.

Opale. C'était le médecin qui les unissait, et ni l'un ni l'autre ne lâcherait l'affaire. Vynce pouvait bien se donner des grands airs, à s'inquiéter comme une mère poule - ou autre chose, lui souffla son esprit - mais Gerhard veillait comme un rapace également, témoin de choses dont Vynce ignorait jusqu'à l'existence toute entière. Ou bien...? Je n’ai pas besoin d’être réellement sur place pour considérer certains agissements de sa part. La phrase avait été dirigée à l'encontre d'un Ezekiel aux abonnés absents, mais Gerhard la prenait comme l'information qu'elle était. Distraitement, sa main se dirigea sur la fleur qui ornait son noeud papillon. Il ne l'arracha pas, tenu à un certain décorum par la rue dans laquelle il se trouvait, les habitants heureux qui coulaient autour d'eux, étrangers à leurs troubles, mais l'envie ne manquait pas.

Il repensa à la petite plante que Vynce avait offerte à Opale le jour où ils s'étaient rencontrés pour la première fois et pensa Oh, la sale petite traîtresse. Il n'y avait donc rien de privé sur cette fichue île ! Les petites oreilles de Monsieur Vynce Stanford traînaient, et il pouvait bien prétendre que c'était innocent, mais il n'empêchait que Gerhard avait envie de prendre pelle et truelle et de déterrer chacune de leurs maudites racines pour les replanter sur la plage. Qu'elles apprennent à cafter leurs secrets à la mer.

Jamais de sa vie Gerhard n'aurait cru vouloir exacter un génocide de plantes en pot, mais rien n'était impossible, il supposait.


Il desserra ses mâchoires et accorda à Vynce un regard fiévreux. Son visage n'exprimait rien, mais ses yeux reflétaient tout ce qu'il pensait tout bas ; quelque chose sur laquelle nombre de gens s'étaient accordés, et auxquelles le regard blasé qu'il leur envoyait confirmait généralement leurs dires.

- Vous êtes bien altruiste, Stanford, rétorqua-t-il sur le même ton qui lui avait été offert, parce qu'il n'était rien si ce n'est généreux dans sa réciprocité, bien sympathique de me laisser faire mon travail.

Gerhard se tourna plus franchement vers lui et énonça clairement :

- Ce n'est pas mon ego qui m'empêche de vous dire quoique ce soit, soyons clair. Je ne vous aime pas. Je n'ai rien à vous dire qui me concerne, autre que le nécessaire. La nature de mon altercation avec monsieur Oldenbourg ne vous regarde pas, il y en a eu une et cela devrait vous suffire. Vous voulez vous prendre pour un chevalier en armure brillante, grand bien vous fasse, mais ne me traînez pas dans votre jeu. Il inclina la tête. Dans tout cela, il ne pensait qu'à une seule personne. Je suis inquiet pour Opale, et c'est bien la seule chose qui nous lie, concéda-t-il. Je ne suis pas un monstre. Vous m'avez précédé, et vous me survivrez bien des années plus tard. Et que l'admission lui coûtait ! Mais il voulait le bien d'Opale avant tout, et toutes les combines étaient bonnes. S'il lui fallait considérer Vynce sous cet angle pour le supporter, qu'à cela ne tienne, il le ferait. La fin justifiait les moyens, après tout. J'ai des rendez-vous dans Lucent chaque jour de la semaine, et si vous avez un doute vous n'aurez aucun mal à vérifier mes absences du manoir. Ce que vous faites tous les deux pendant que vous êtes là vous regarde, mais de grâce n'allez pas dans ma chambre.

Il jetterait par la fenêtre la moindre feuille qu'il verrait traîner entre ces quatre murs, il le pressentait, et si son regard appuyé suggérait quoique ce soit, Vynce le savait également. Ou bien l'idée ne l'avait même pas frôlé ; après tout, songea Gerhard avec une dernière grimace pour le gardien, il était si sympathique, tout ça c'étaient des manoeuvres d'humain, hein. Il n'avait pas envie d'en entendre davantage. Peut-être qu'il se mettrait à parler allemand ; ç'avait l'air d'être le point faible du gardien, et il n'était pas assez noble pour ne pas l'exploiter. Quoi dire, pensa-t-il en reprenant sa marche pressée vers le centre communautaire, lassen Sie mich in Ruhe ou ich werde alle Pflanzen auf der Insel ausgraben und sie im Meer ertränken ? Son coeur balançait.
Jeu 2 Mai 2024 - 14:25
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Vynce Stanford
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Tu observes, analyses, étudies chaque faits et gestes, grimaces ou mimiques du psychiatre comme si tu étudiais une plante ou un plan pour fabriquer un nouvel appareil. Tu lis et perçois toute l’animosité qu’il peut ressentir en ta présence, à ton encontre, une douleur presque palpable, celle de ta présence, de tes mots. Tu ne t’attendais pas à ce qu’il avale tes mots bien gentiment et qu’il les assimile comme de la vérité pure, tu savais qu’il s’en moquerait pour la plupart et qu’il ne retiendrait que ce qu’il voudrait bien entendre. Grand bien lui fasse. Mais sa répartie ne se fit pas attendre après tes propos, c’était attendu ça aussi. Aux premières notes de sa voix, tu sais que certains termes ont été retenus de façon péjorative.

Tu es déjà blasé avant même d’avoir fini de l’écouter. Qu’il ne t’aime pas, ça, il ne faut pas être devin pour le comprendre, même un aveugle sourd et muet aurait pu le sentir. Oui, tu exagères un peu, mais depuis cette incartade dans la cuisine d’Opale, Gerhard voit en toi un ennemi potentiel, une menace. Si ce n’est pas son égo qui l’empêche de te dire ce qu’il a sur le cœur alors, qu’est-ce que c’est ? Tu te demande bien ce qu’il attend pour te parler honnêtement de ce qu’il a au plus profond de lui, ce qui anime cette rage en lui, ce qui s’est passé à leur première rencontre ne peut pas être la seule raison de cette véhémence à ton encontre.

Est-ce qu’il disait indirectement que tu étais un monstre ? Tu fronces les sourcils et détournes la tête vers lui à ses derniers mots, cette supplique pour que tu n’entres pas dans sa chambre. Qu’est-ce qu’il sous-entend exactement par-là ? Tu t’indignes presque qu’il te pense si fourbe à ce point.
“Votre chambre ? Mais jamais je n’ai…” Eu l’intention d’y entrer ! Ce que tu ne termines pas car l’évidence te frappe soudainement. Tu comprends l’exactitude de ses mots quand tu perçois sa main glisser jusqu’à la fleur à son nœud papillon. Tu éclates d’un rire franc, jaune, quelque peu nerveux et agacé également. Qu’il en vienne à penser que tu espionnes tout de cette manière jusqu’au moindre détail de la vie privée des gens de cette île, oui, tu pourrais bien le faire, c’est vrai, mais c’est totalement absurde. Tu as une certaine éthique et un savoir vivre qui t’empêche radicalement de vouloir faire ce genre de choses puis… tu n’es pas aussi omniscient que la Matriarche. Même si ça peut être un puissant atout, la nature ici n’est pas aussi coopérative que sur ton lieu de naissance et elle est parfois farouche. Tu comptes bien te garder de lui dire que les informations tu ne les détiens pas toujours, ni toutes et absolument pas en temps voulu comme tu le voudrais, de plus, les plantes ont leurs limites également et leurs propres secrets. Tu secoues la tête en lâchant dans un soupir las. “Já não aguento mais !” Tu passes ta main gauche sur ton visage, te pinçant l’arête du nez en fermant les yeux d’un agacement non contenu. “Vous êtes un éphémère particulièrement pénible et agaçant, Gerhard, je ne saisis pas vraiment quelle était la manœuvre que vous avez tenté d’engrener avec ce sous-entendu de menace…” Non, tu ne la saisis pas, et, autant être franc, tu n’as pas tellement envie de la comprendre. S’il cherchait juste à vouloir faire la paix avec toi ou seulement te pousser à sortir de tes gons dans des mises en gardes sur Oldenbourg dont tu te serais bien passé en réalité.

Alors, tu le dépasses d'un pas pressé, venant t’arrêter en face de lui pour le couper dans son élan. Lui faisant face, il est d’une demi tête plus grand que toi mais il ne te fait pas peur. Tu te contentes simplement de le regarder sans hausser le menton, te donnant un air beaucoup plus sévère.
“Puisque ce n’est pas vôtre égo qui vous empêche de me dire ce qui vous pousse à être comme ça avec moi alors allez-y, je vous écoute. Crachez-moi au visage tout votre venin, qu’on en finisse avec ce petit jeu stupide.”
Tu attends quelques minutes, dirigeant cette fois-ci ton visage vers lui. Tu ne bougeras pas tant qu’il n’aura pas dit ce qui lui tient à cœur et tu comptes bien lui barrer la route quand bien même il tentera d’esquiver ou te détourner, tant qu’il n’aura pas crevé l’abcès ni même lâché ce qui le rend si mauvais à ton encontre. Toi, tu as l’éternité devant toi, lui peut-être moins, mais tu ne lâcheras pas le morceau. Et si tu dois le provoquer pour qu’il s’y mette réellement pour qu’enfin il lâche la bride, tu comptes bien tenter, à voir comment il va se comporter. Tu as déjà des options en tête, probablement qu’elles seront aussi prévisibles que ce auxquelles tu t’attendais.
“On n’arrivera à rien si on ronge notre os dans le mutisme tous les deux. Ce n’est pas censé être vous le psychiatre ? Celui qui éclaire l’esprit de ses patients et leur permet de trouver la voie vers la raison ou le bien-être ? Vous avez frappé à la porte, Monsieur, j’aurais très bien pu la laisser fermée tout à l’heure sur la plage et ne pas vous suivre, pourtant je vous l’ai ouverte. Alors saisissez l’opportunité, il n’y en aura peut-être pas d’autres.”

Ft. Gerhard Speckmann “”


Jeu 2 Mai 2024 - 16:28
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Gerhard Speckmann
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Le rire jaune de Vynce Stanford dissonnait avec les festivités qui les entouraient. Il résonnait à ses oreilles comme des railleries particulièrement grinçantes, mais semblerait-il qu'il était le seul à l'entendre ainsi ; les passants ne leur accordaient pas un coup d'oeil, le trouvant peut-être à sa place dans ces rues débordantes de liesse. Ou bien ils étaient trop emméchés. Gerhard regretta soudainement ne pas avoir laissé Vynce se mettre une cuite sur la plage, l'avoir délogé de ce petit cabanon et de son verre qu'il avait vidé d'un seul trait pour le suivre.

Il aurait dû apprendre à fermer sa grande gueule et à garder pour lui ses troubles. Le grand Vynce n'avait pas besoin de ça pour veiller sur l'île ; eh bien tant mieux ! La prochaine fois - si prochaine fois il y avait - Gerhard ne se dérangerait pas ; ne le dérangerait pas, ce grand sire qui se pinçait l'arête du nez avec l'air d'un professeur excédé. Gerhard voulait croire que la leçon était passée, qu'ils l'avaient tous les deux apprises et qu'ils sauraient s'y tenir ; y crut même, lorsque Vynce Stanford se mit à marcher plus vite, se trouva à souhaiter qu'il se laisse avaler par les rues et les habitants de Lucent et qu'ils ne se croiseraient plus jamais.


Mais non. La providence ne répondait pas aux voeux d'un ingrat, et Vynce la manipulait d'une main de maître. Il se dressa devant lui, lui barra le chemin, un mur immuable. Gerhard avait les centimètres en plus, Stanford était plus large, le tissu de son costume tendu par la stature qu'il dissimulait en dessous. Il aurait pu le bousculer mais se serait retrouvé sur les rotules. Il aurait pu le contourner, mais Stanford avait cet air déterminé dans les yeux. Il avait bien choisi son moment ! Gerhard aurait voulu avoir la même capacité de persuasion qu'Opale avait sur le gardien, mais c'était une douce utopie ; le médecin les tenait tous les deux dans sa paume, et ils se battaient sur ce plateau. Ils n'obéissaient bien qu'à lui, et encore le mot était fort. Sans garde-fou, rien pour les dissuader.

Crachez-moi au visage tout votre venin. Gerhard se mordit l'intérieur des joues. La bien belle affaire ! Les mots se bousculaient dans sa gorge mais il était incapable d'en sortir un seul. S'il ouvrait la bouche, sans doute aurait-il hurlé un bruit qui n'avait rien d'humain. Rien d'éphémère, il y aurait veillé ; aurait fait en sorte qu'il résonne sur toute l'île pour des millénaires, qu'il s'inscrive dans la barrière et suive Stanford jusque dans la tombe. Il était assez égoïste pour y réfléchir, et assez rageur pour y parvenir. Il aurait été bien heureux de ronger son os dans le mutisme, comme le disait si bien ce cher gardien, mais celui-là même fouillait les eaux troubles en espérant se faire mordre ; et sur qui retomberait la faute, alors ?

Pas pour la première fois, Gerhard se rappela à quel point il dépendait de la bonne volonté des autres ; mais soudainement, il n'en avait guère. Opale— On ne pouvait le punir d'avoir répondu au voeu d'un autre, surtout quand ce dernier tenait à ce qu'il soit exaucé. Peut-être avait-il raison - et cela lui en coûtait de l'admettre - mais un abcès devait être crevé, peu importe la gravité. Resterait derrière la cicatrice, ou bien quelque chose de plus grave encore ; ces blessures, parfois, ne se refermaient jamais vraiment, l'infection s'étendait, la gangrène suivait.

Mais le statut quo, de toute façon, n'était plus possible à maintenir. Stanford l'exigeait. Gerhard était un humble habitant - quelle blague - et il s'exécutait.

- J'aurais dû la laisser fermée, reconnut-il, cracha presque. Il ne comptait pas se battre, mais s'était naturellement voûté, la tête rentrée dans les épaules dans un réflexe protecteur. Ses poings se serraient et desserraient dans un réflexe qu'il ne contrôlait pas. Comptez sur moi pour ne pas refaire la même erreur. Vous voulez parler psychiatrie, Stanford ? Ce qu'on apprend, c'est de ne jamais forcer la parole d'un autre. Si la séance doit se passer en silence, elle se passera en silence, parce que ces choses prennent du temps. De la confiance. Et vous n'avez pas la mienne, et je n'ai pas la vôtre, grand bien vous fasse, je m'en fiche. Il sourit, mais il n'y avait aucune joie. Il se souvint avoir arboré le même rictus avant qu'Ezekiel ne le morde, et le chassa bien vite, ne laissant dans son sillage qu'un fantôme de grimace. On croirait que de nous deux, c'est vous qui n'en avez pas.


Gerhard laissa échapper une expiration tremblante. La colère le secouait des pieds à la tête. Il détacha son regard de Vynce, le dirigea vers le ciel ; mais les étoiles étaient masquées par la pollution lumineuse, et la barrière miroitait à peine au-dessus de leurs têtes. Un rappel de la protection qu'elle leur apportait, une protection qu'ils ne pouvaient franchir sans l'accord de cette mystérieuse Matriarche. Jamais il n'aurait cru pouvoir être claustrophobe à l'air libre, mais il trouva soudainement que sa gorge était serrée, que des sueurs froides lui dégringolaient le dos. Il ne voulait plus être ici. Il voulait retrouver Opale ou Gabriel ou les deux, se perdre dans la foule et oublier jusqu'à son nom.

- Vous voulez la vérité ? somma-t-il, la voix soudainement éteinte. Ce n'était pas la première fois, ces derniers jours, qu'il reconnaissait quand la bataille était perdue, et cela le déprimait d'autant plus que sa fierté en était atteinte. Il m'a attiré là où nous étions seuls, nous avons parlé, il m'a blessé. C'est ce que vous voulez entendre ? Vos suppositions confirmées ? Gerhard braqua sur le gardien un regard noir, tant par la couleur de ses prunelles que par toutes ces émotions qui virevoltaient lui. Les voilà, et me voici. Intact. Monsieur Oldenbourg ne m'a rien fait d'autre, si ça peut vous rassurer, et j'en fais mon affaire maintenant, et vous en faites la vôtre, j'imagine. Est-ce que ces réponses vous satisfont, Stanford, ou voulez-vous que je vous confie autre chose qui ne vous regarde pas ?

Il avait à peine une inflexion dans la voix, mais celle qui se préparait à la suite. Cette confession lui avait été arrachée, mais c'était la seule que Vynce aurait jamais ; Gerhard le regarda, les lèvres serrées en une longue ligne blanche, et s'en fit le serment, et le fit au gardien également, et peut-être qu'il le remarqua ou peut-être pas, mais ça lui était égal. Il contournerait Vynce, dût-il le bousculer pour y parvenir.
Ven 3 Mai 2024 - 12:47
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EVENT ▬ Rancune tenace
Et les dents si longues qu’elles râclent le sol
Les mots du psychiatre tonnent tel un orage lointain approchant sous un vent violent. Tu es capable de la ressentir toute cette tension, tant dans son attitude que dans ses mots. Il aurait dû la laisser fermer cette porte ? Mais de ce que tu en as perçu elle l’était déjà. Et maintenant tu écoutes en silence ce qu'il a à te dire, cette petite leçon qu'il t’instruit, son doute quant au fait que ni lui ni toi avez une confiance en l’autre, et qu'il ose te dire que des deux il n'y a que toi qui n’en n’ai pas te laisse muet. Ses regards noirs cumulés à ses paroles acerbes, quand bien même il te révèle ce que tu savais déjà, que tu supposais tout du moins sans réellement en avoir la certitude, tout chez lui prouvait qu'il s’était fermé, blindé et avait sorti les pièges et les accessoires de défense. Inutile de continuer ainsi, ce qui ressortirait de cette discussion ce soir ne serait que pure déchéance. Une ouverture au conflit. Une guerre froide entre Gerhard et toi. Une discussion stérile, ou plutôt une belle façon de raviver la flamme en y jetant du combustible. Il est donc inutile de continuer plus longtemps dans cette discussion sans quoi il finira bien par y avoir un pugilat. Le temps, est finalement le seul allié que tu puisses avoir actuellement. Mais ça ne te donne pas non plus envie de faire l’effort si de l’autre il n’y en a pas.

Ton regard soutient sans faillir les orbes sombres et menaçants du psychiatre, ton visage impassible, fermé à toute émotion pouvant t'assujettir et te trahir sur les sentiments qui naissent à l’encontre de ton homologue. Si lui ne t’aime pas, c’est une chose, pour toi, il te fait de la peine. Des Gerhard, tu en as croisé des tas avant lui, et certains plus violents et impulsifs que lui. Ce que tu perçois dans ce genre de comportement c’est surtout du désarroi, la colère de se sentir acculé et d’avoir peur de ce qui nous fait face. Tu lâches simplement un lourd soupir en fermant les yeux, te détournant pour le laisser passer et reprendre la marche pour l’accompagner. “Je vois, Speckmann… Je vous vois très bien...” Nonchalant, tes mains retrouvent leurs poches et tu avances dans un mutisme absolu. Tes pensées fusent et les mots de Gerhard tournent en boucle désormais. Une chose est certaine, une fois au centre communautaire, tu retourneras à tes rondes afin de t’assurer qu'il ne se passe rien dans les recoins les plus sombres de l’île.

Vous avancez dans un silence pesant jusqu’au centre communautaire. La foule s’épaississant petit à petit dans les rues, l’effervescence de la musique et des gens animant pleinement le centre-ville. Cependant, droit devant vous, un petit attroupement se fait, des pleurs se font entendre, ceux d’un enfant. Des adultes tentant de rassurer l’enfant dont le genou et le front saignent. En te voyant arriver aux côtés de Gerhard, l’un des adultes t’alpague. “Hoey, Vynce, Docteur ! Ça tombe bien que vous soyez là.” Ton regard se pose sur l’enfant blessé qui pleure à chaudes larmes.
“Allan ? Qu’est-il arrivé à Damian ?”
“Il courait et il est tombé. Il a heurté le sol.”
Tu grimaces un sourire empathique. “Ouch ! Laissez-moi regarder ça…” T’approchant du jeune homme en retroussant un peu la manche de ton bras droit et retirant ton gant, découvrant ainsi de multiples cicatrices sur le peu de peau que tu dévoiles.

Tu observes un peu ses blessures, l’enfant dégageant le mouchoir humide qu’il a sur le front pour te laisser voir l’ampleur des dégâts. Tu récupères ce dernier pour nettoyer le sang et voir la plaie. Tu fronces les sourcils, il aura probablement une belle bosse mais ça n’est rien d’alarmant. Tu lui poses des questions à savoir s’il a des vertiges ou des nausées, mais l’enfant secoue la tête en réponse, c’est juste de gros bobos, pas de quoi s’affoler dans ce cas, mais il faudra tout de même qu’il aille voir Opale demain ou peut-être après-demain s’il décuve. Alors, de ta main droite, tu récupères dans le holster d’épaule sous ta veste un couteau que tu gardes toujours en cas de besoin, même durant ce genre de soirée -sait-on jamais-. Quand bien même tu ne l’utilises pas, il peut toujours être utile. Tu te fais une petite entaille et ranges le couteau dans son fourreau. “Ça saigne toujours beaucoup à cet endroit-là, mais ça n’est rien de grave. Je vais m’occuper de ça, il faudra aller voir Opale demain, d’accord ?”

L’enfant hoche la tête en reniflant, s’essuyant les larmes d’un revers du poing. Tu passes ton doigt entaillé sur la plaie avec délicatesse, étalant ta sève sur cette dernière et autour afin de faire un pansement conséquent. L’enfant grimace mais se laisse faire et ne te repousse pas malgré la douleur qu’il peut ressentir au geste que tu effectues pour arrêter l’hémorragie de ton sang Tu fais pareil sur le genou esquinté du petit, étalant délicatement ta sève, une fois la plaie nettoyée en partie, sur les éraflures afin de faire arrêter le saignement. Une fois les soins effectués, tu te relèves et souris, passant ta langue sur ton doigt pour arrêter ta sève de couler et nettoyer le sang qui reste avant de remettre ton gant.
“Voilà qui devrait suffire pour ce soir. Attention à toi d’accord ?”
Les parents te remercient, tout comme l’enfant qui tente de se redresser et claudique un peu. Ta sève commence déjà à faire effet et malgré la texture pâteuse et collante, elle a déjà arrêté l’hémorragie et commence à réparer les tissus déchirés. Ça mettra du temps, mais sur les enfants en pleine croissance, la régénération est plus rapide.
“Allez viens, on rentre, il se fait tard de toute manière, il faut te reposer mon grand, merci Vynce.”

Tu souris faiblement et hoches la tête. Saluant le gamin en lui ébouriffant les cheveux avant de revenir au niveau de Gerhard et reprendre la route vers le centre communautaire qui se trouve en face de vous. Ton visage redevient pensif durant votre marche. Tu fronces les sourcils, résigné d'une certaine manière. Les festivités dans ton état actuel ne sont pas les bienvenues. Tu préfères prendre ton rôle plus au sérieux. De toute façon pour toi, c'est ton travail de gardien qui se joue ce soir. Une fois les marches montées, tu t’arrêtes, la mine renfrognée.
“Prenez soin d’Opale, Speckmann…” Ta voix passe à travers la musique et l’effervescence, ton regard déterminé et froid scrutant le psychiatre. “C’est tout ce que je vais vous demander.” Le protéger d’Ezekiel principalement. La seule confiance que tu mettras en lui. Et s'il lui arrive quelque chose, il y a des chances que tu le prennes mal. Le reste, qu'il vienne te voir ou non pour t’informer des manigances du professeur, tu n’en n’as rien à faire. Tu finiras par le savoir. Si Oldenbourg est une menace, tu espères que Gerhard saura ouvrir les yeux d’Opale à ce sujet. Tu esquisses un sourire amer à son encontre. “Et essayez un peu de vous décoincer, ce soir. Après tout, vous êtes censé faire la fête…” Tu te détournes pour repartir dans les rues de Lucent, attendant avec impatience que le jour se lève pour que la ville redeviennent plus silencieuses.
Ft. Gerhard Speckmann “”


Ven 3 Mai 2024 - 13:52
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