Felice est né dans les années 1950, en monarchie unitaire d'Italie. Fort heureusement pour sa propre sécurité, il a pu grandir dans un petit état humain qui n’était pas entièrement hostile aux nébuleux, formé autour de Florence. Tous les êtres semblables à lui qu’il ait connu vivaient sous la protection de familles humaines, en échange de leurs loyaux services. Nombre d’entre eux y ont été contraints, cependant, voyant que le petit État était le seul bastion de paix dans un pays gangréné par les conflits. Pour certains, la servitude était plus simple que de risquer de perdre la vie en cherchant la liberté. D’autres espèces quant à elles, entretenaient déjà avec les humains des liens secrets datant de plusieurs siècles. Les Pontecorvo, une longue lignée de Maras protégée des conflits récents, en faisaient partie. Si leurs capacités étaient synonymes de terreur et de chaos pour la plupart des humains, elles avaient un intérêt plutôt évident pour des figures de pouvoir souhaitant élargir leur influence. Les Maras faisaient des agents parfaits pour espionner et nuire à leurs rivaux.
Felice n’a que très peu connu ses géniteurs, avant d’être remis à une famille d’ascendance noble, très attachée aux traditions et à la grandeur de la renaissance Italienne et repoussant farouchement les nouveautés technologiques. Sous sa coupe, il eut une éducation proche de cette descendance noble. Il apprit à parler plusieurs langues, les bonnes manières, la musique… À une différence près. Pendant que ses camarades humains vaquaient à des occupations de leur âge pendant leur temps libre, lui partait en mission. Il récoltait des informations, glissait des poudres suspicieuses dans des verres laissés sans surveillance, ou bien faisait en sorte de donner de glisser des visions prémonitoires dans l'esprit des adversaires superstitieux, des choses qu’il ne comprenait pas vraiment. Mais ça lui importait peu, ses maîtres semblaient toujours satisfaits de ses exploits. Et sa maison gagnait en importance, au point de se confronter aux états voisins. Felice n’avait pas à s’inquiéter de son sort, il vivait confortablement, tant qu’il obéissait. A l’écart des adolescents de son âge, certes, mais il avait largement de quoi s’occuper : quand il ne disparaissait pas dans la nuit, il appréciait parfaire sa maîtrise de la guitare pour distraire ses maîtres.
Quelques années plus tard, le vent se mit à tourner, cependant. Il ne savait pas précisément pourquoi, mais sa petite communauté perdait en puissance. Jusqu'à ce que ses maîtres disparaissent un jour sans laisser de trace, alors qu'il était parti en mission. Il était clair qu’ils avaient été tués. Comment et par qui, il ne le sut jamais, mais la disparition de sa maison signa définitivement le démantèlement de l'État florentin. Il se retrouva dans une vague de conflits chaotiques, sans repères, et dans tout ça, il avait de plus perdu abruptement ses pouvoirs.
Contraint de quitter son foyer de toujours et incertain de la direction qu'il devait prendre, il était cependant convaincu que trouver de nouveaux maîtres était sa priorité. Il vécut ainsi sur la route pendant un bon moment, observant le monde avec curiosité et effroi. Après tout, il n'avait que rarement quitté sa ville natale, ce microcosme où il vivait sans danger. Hors de son territoire, il vit que les humains menaient une guerre sans merci aux siens et préféra se faire discret. Il offrit tout de même plusieurs fois ses services à des familles humaines, mais chacune de ses tentatives se solda par des refus, dans le meilleur des cas.
Quelques semaines plus tard, un autre problème commença à freiner ses péripéties, presque indicible au départ. Il remarquait que marcher le fatiguait plus vite, il s'essoufflait dans les pentes. Ses plaies superficielles semblaient se refermer bien plus lentement. Chaque jour, son sommeil était plus long. Il mit d’abord cette soudaine faiblesse sur le compte de son mode de vie chaotique, mais plus les jours passaient, plus cela lui semblait évident. Ses forces s’amenuisaient. Chose qui ne lui était jamais arrivée, sa santé avait toujours été très stable. Il n'avait pas conscience que ce mal était lié à son pacte brisé, mais quelque part il savait que ça n'avait rien d'une affliction humaine. Persuadé que retrouver une maison le tirerait de ce mauvais pas, il parvint finalement à atteindre les côtes, non loin du territoire français. Dans la petite ville portuaire où il avait atterri à bout de forces, à sa grande surprise, un homme le recueillit. Un humain, pourtant il n'eut pas d'hostilité à son égard, et il sembla même percevoir ce qui le rongeait. Il lui dit avoir souvent protégé des êtres de son genre et qu’il en avait soigné par le passé. Malheureusement, l’origine de son mal lui était inconnue, et il ne pouvait l’héberger plus longtemps. Cependant, il avait eu vent par un de ses protégés, il y a bien longtemps, d'un endroit où peut-être, la magie l’aiderait à reprendre des forces, et lui promit qu'il l’aiderait à l’atteindre. Felice se résigna finalement à le suivre... Ce n'était pas comme s'il avait d'autre issue, de toute façon, et cette aide inespérée lui semblait tombée du ciel. Il n’a que peu de souvenir du voyage qui l’a mené jusqu’à Nitescence, ni de la brève entrevue qui décida de son statut provisoire de protégé en attendant son rétablissement, mais le voilà comme nouvel arrivant de l’île.

Permettez moi de débarquer avec mon boulgour…